Speak No Evil
6.2
Speak No Evil

Film de James Watkins (2024)

Première au Festival de Deauville : le final est accueilli par une salle enthousiaste face à la violence joyeuse à l'écran, et nous-même étions agréablement surpris que ce remake change totalement la fin du film original (éponyme), pour en faire un petit moment de fun, bas du front et heureux de l'être. Le film danois était pessimiste et "intello au filtre grisâtre" (il se compte dans les "elevated-horror", soit les conducteurs de Tesla du genre horrifique), le remake américain est optimiste et débile. Devinez lequel on préfère. Si vous faites partie de l'opposition, on comprend amplement (l'original critique les rapports sociaux entre riches et pauvres au Danemark, la violence gratuite, donne plus d'intelligence à ses personnages qui cachent mieux leur jeu, et la fin est plus audacieuse et crue), en revanche, si vous n'avez pas encore vu l'original, on vous recommande vraiment de choisir entre les deux, ou au moins de ne pas les regarder simultanément : la version 2024 est quasiment un remake plan-par-plan. L'impression de voir deux fois le même film vous guette, si vous les enchaînez. Mais puisque l'on parle ici de la version 2024, on avouera que James McAvoy est comme d'habitude déchaîné (un peu trop, dans quelques scènes où son personnage en fait des caisses), les ressorts narratifs sont solides (on se laisse prendre au jeu du chat qui joue avec les nerfs de sa souris), les notes d'humour sont des ajouts agréables (par rapport au film danois froid et distant), et comme la finesse est aux abonnés absents (ce remake ne cherche pas à être malin, mais juste à divertir copieusement), on s'amuse. On aime beaucoup, d'ailleurs, le tacle envers le film original au début du remake : il va vous répéter dix fois combien ils sont "barbants, et qu'ils se la pètent, ces Danois..." Oui, la nationalité du couple de touristes critiqués en boucle n'est pas un hasard, et le remake souligne dès lors son envie de se détacher de son modèle, malgré son déroulé quasi "plan-par-plan", il ajoute une patine plus décomplexée sur l'ensemble, donnant à voir des personnages caricaturaux au possible (

le couple bobo qui surprotège leur gamine accroc à son doudou et aux écrans comme nounou, le dégénéré de la campagne reculée qui est un cliché de la folk horror, le gamin qui est un souffre-douleur explicite...

), des situations cocasses inédites (

lorsque le couple de campagnards fait semblant de se faire une gâterie sous la table, quand le bobo se fait piéger pour payer l'addition - dans l'original, la mise en scène laisse un temps, un moment de gêne, qui gâche l'effet comique, alors que le remake y va avec ses gros sabots, il enchaîne directement sur le "merci mon pote" qui est drôle

), et surtout une fin qu'on a aimé. Entre

Madame qui se paye deux méchants à coups de marteau, à elle toute seule (et ça fait un bien fou), et le gamin qui pète un câble et explose salement la tête de McAvoy avec une grosse pierre (idem : pour un tel méchant, ça soulage), et une happy-end qui nous réjouit niaisement

: carton-plein pour cette nouvelle fin. Un remake régressif et assumé, tout ce qu'on aime.

Aude_L
7
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le 19 sept. 2024

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