Ce qui est bien avec les films Marvel, c'est qu'à force de nous servir des Big Mac froids, d'arriver à encore plus nous décevoir à chaque nouveau long-métrage, on finit presque par être surpris des rares qualités émanant de leurs productions.
Prenez les trois films précédant Spider-Man No Way Home : Black Widow, Shang-Chi et la Légende des Dix Anneaux et Les Éternels : ils sont nuls !… mais ça tout le monde le sait. Par contre, Disney avait engagé des réalisateurs un minimum talentueux pour tourner ça… ce qui était pire en fait, puisque ça donnait l'impression que des artistes avaient perdu leurs temps pour réaliser ces trucs insipides.
Là, ça tombe déjà mieux, ils ont repris ce tâcheron de Jon Watts, déjà aux commandes pour des deux précédents films, ce qui fait qu'on était en droit de ne s'attendre absolument à rien. À partir de là, je ne pouvais pas être plus déçu que je ne l'étais déjà, et à vrai dire, je m'attendais à détester ce film comme pas possible… ce qui fait que j'ai presque été positivement surpris par ses rares qualités, notamment au niveau de la mise en scène. Parce que oui, il y en a. Très peu certes, mais il y en a.
Par exemple, il y a un plan-séquence très sympa lors des premières minutes du film, après que MJ soit retournée à l'appartement de Peter avec lui. Autre bonne idée, l'utilisation d'un travelling compensé lorsque Peter sent « le retour » du bouffon vert, une fois arrivé au milieu du film. Bien sûr, on n'est pas au niveau d'un Sam Raimi, ni même d'un Marc Webb, mais il y a du mieux par rapport à ce qu'on avait avant. Applaudissons Jon Watts les amis !
Au niveau du scénario, j'ai cru que ça parait plutôt bien là aussi. Déjà, ils ne nous ont pas refait le coup de la suite qui a lieu plusieurs mois après la révélation de fin : No Way Home débute pile au moment où Far from Home se concluait. Tout le monde connaissant la véritable identité de Spider-Man ; sa vie, ainsi que celle de ses proches, devient impossible. Il y a d'ailleurs tout un délire complotiste concernant le fait que Spider-Man serait un terroriste qui aurait tué Mystério ; et J. Jonah Jameson (bien que toujours interprété par J. K. Simmon) devient ici une parodie d'Alex Jones… puis au bout de quelques minutes le scénario démarre vraiment et ça devient encore plus débile que dans n'importe quel autre film du MCU. Tout le monde a fait cette remarque, mais la manière dont le Docteur Strange s'y prend afin de faire oublier au monde entier la véritable identité de Peter Parker n'a absolument aucun sens : pourquoi ne rien avoir planifié ? Pourquoi ne pas avoir essayé un autre plan moins dangereux que celui-ci ? C'est toujours exaspérant d'être face à un scénario qui avance grâce à la connerie de ses personnages. C'est à croire que le film a été écrit par Ridley Scott.
Je veux bien admettre que le film a été conçu pour faire plaisirs aux fans, mais je pense qu'on était en droit de s'attendre à mieux… quoique vu les critiques dithyrambiques lors de la sortie du film, je sais maintenant que les ânes préféreront toujours la paille à l'or.
Le film est bourré d'incohérences et autres propos illogiques qui vont à l'encontre de ce qui a été établi dans les précédents films Spider-Man, notamment lorsqu'on s'intéresse au cas des méchants (la personnalité des antagonistes, le fonctionnement de leurs pouvoirs, le fait de vouloir les « guérir », etc.)… ce sont certes des détails, mais ça prouve bien une chose : même en se focalisant uniquement sur l'aspect fan service, le film rate énormément de choses.
Bien qu'ils se mettent à attaquer Spider-Man sans aucune raison, les méchants ne sont pas non plus totalement ratés… en tous cas, ils ne le sont pas tous. Le Docteur Octopus et le Bouffon Vert s'en sortent bien mieux que les autres : déjà parce que les deux acteurs, Alfred Molina et Willem Dafoe, sont (comme toujours) excellents… mais surtout parce que Thomas Haden Church (l'Homme-sable) et Rhys Ifans (le Lézard) n'ont tout simplement pas passé une seule journée sur le tournage : des rushs des précédents films ont été utilisés dans les scènes dans lesquelles les acteurs apparaissent (ce qui explique d'ailleurs pourquoi on les voit si peu). Quant à Jamie Foxx (Electro), il n'est vraiment pas bon ici. Je disais plus haut que la personnalité des antagonistes et le fonctionnement de leurs pouvoirs n'avaient pas forcément de sens avec leurs films respectifs, et c'est complètement le cas avec ces trois derniers méchants : l'homme sable n'a absolument aucune raison de vouloir affronter Spider-Man, le Lézard doit utiliser un produit pour se retransformer en humain et non l'inverse, quant à Electro, c'est littéralement un autre personnage, que ce soit au niveau du physique ou de la mentalité.
Bref, je ne vais pas m'attarder plus que ça sur le scénario, il y a encore tant à dire que l'on pourrait écrire un livre, et je suis en train de perdre assez de temps comme ça.
Je disais plus haut que j'avais été positivement surpris par les rares qualités du long-métrage, notamment au niveau de la mise en scène… ça ne veut pas pour autant dire que le film est réussi de ce côté-là, loin de là même ! Je rappelle qu'on est dans un Marvel, réalisé par John Watts qui plus est. Donc, sans surprise, les combats sont ratés. J'avais déjà tendance à comparer les affrontements dans les films Marvel à d'autres films de superhéros… bon là pour le coup ça tombe bien vu qu'on retrouve les mêmes méchants et les mêmes acteurs que l'on trouve dans d'autres films que je prends pour référence : les trois Spider-Man de Sam Raimi en l'occurrence. Et pour le coup, à moins d'avoir de la merde dans les yeux ou d'être de mauvaise foi, je ne vois pas comment on peut préférer les combats de ce film à ceux de la première trilogie tant l'écart est impressionnant. En outre, on retrouve les sempiternels défauts des scènes d'actions des productions Marvel : la caméra qui bouge dans tous les sens, le côté ultra-découpé, le fait qu'on ne ressente pas les coups, etc.
À la rigueur, le combat contre Docteur Strange et le premier contre le bouffon Vert s'en tirent le mieux (ou s'en sortent moins mal que les autres, c'est au choix). Le premier parce qu'il reprend son délire autour de la perspective que l'on pouvait déjà voir dans le premier Doctor Strange (autant dire que No Way Home n'invente rien), le second parce qu'il arrive presque à se montrer un minimum brutal. On aurait pu avoir droit à des scènes bien sympathiques à la fin, au moment où les trois Spider-Man se battent ensemble, à un côté symbiotique… mais il n'en est rien : le trio se bat surtout chacun de son côté.
Sans surprise, les plans sont moches, les décors sont moches. Ça ne touche pas que les combats, mais en l'occurrence, on aurait pu avoir un lieu pour l'affrontement final bien moins laid que les échafaudages de la statue de la liberté (je suppose que c'est un hommage raté à Spider-Man 3)… statue de la liberté avec le bouclier de Captain America… sans commentaire. Il y a aussi une scène qui fait référence à la chute de Gwen Stacy à la fin de Amazing Spider-Man 2, il faut le voir pour y croire tant la scène est ridicule en plus de ne ressembler à rien.
Il y a un truc que j'ai du mal à comprendre de toute façon, que ce soit pour ce film-là ou pour n'importe quelle autre production Marvel : l'écrasante majorité des scènes étant tournées sur fond vert, voir uniquement en image de synthèse (on se rapproche dans ce cas-là du film d'animation), pourquoi ne pas innover ? Pourquoi ne pas laisser libre cours à la créativité ? Je vais prendre un exemple au hasard (si si je vous jure), mais un certain film d'animation s'intitulant Spider-Man: Into the Spider-Verse nous en met plein la gueule durant pratiquement deux heures alors qu'il a coûté deux fois moins chères à produire. Franchement, je ne comprends pas comment on peut manquer autant de créativité.
Enfin, que serait un film Marvel sans ses dialogues savoureux ? (j'ose espérer que vous avez capté l'ironie)
Là encore, sans aucune surprise, c'est mauvais. On retrouve les classiques blagues nulles servants à « dédramatiser » l'action… mais en pire ! Le premier combat contre le Docteur Octopus se termine par un sketch ridicule et une fois capturé, on a droit à des vannes lourdes sur son nom. On se croirait revenu à l'époque de la série Batman des années 60 par moment… ou dans Batman & Robin, c'est au choix.
Le pire je crois que c'est l'insistance sur les blagues niveau collège entre les trois Peter Parker, notamment sur le fait que le Spider-Maguire puisse secréter ses propres toiles. Là encore, on aurait pu avoir droit à des dialogues bien écrits, mais à la place, on a droit à des blagues nulles sur la manière dont ils conçoivent leurs toiles et des comparaisons concernant des trucs qu'on sait déjà, notamment les ennemis qu'ils ont combattus.
À ce qui paraît, c'est surtout pas mal d'impro… mouai, bon, pour le coup ça aurait été quand même sympa d'écrire des dialogues au cas où.
Mention spéciale au « You're Amazing ! » de Peter Maguire à Peter Garfield, répétée 150 fois histoire que tout le monde puisse bien comprendre la blague-référence.
On a d'ailleurs un autre dialogue « clin d'œil » au moment où Tante May meurt : « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités ». Aucune subtilité là non plus, mais on a peut-être affaire à l'une des moins mauvaises scènes du film donc je ne vais pas trop cracher dessus non plus.
Le film se conclut sur l'aboutissement du sortilège du Docteur Strange : tout le monde oubliant alors l'existence de Peter Parker dans son univers… et ce n'est pas plus mal puisque ça veut dire que Sony s'occupera des prochains films de la saga. En voilà une excellente chose ! Vous voyez bien que le film n'a pas que des défauts !
Bref, comme on a pu le voir dans cette critique, le film est mauvais sur (presque) toute la ligne. Mais j'ai au moins enfin compris comment visionner un film du MCU : en s'attendant au pire !… et le pire n'est jamais décevant.
En voilà une belle leçon non ?