Acteur, scénariste, producteur mais aussi réalisateur, Tom McCarthy, figure du cinéma indépendant américain, revient en force avec Spotlight. Basé sur des faits réels, le film retrace l'enquête fascinante de 12 mois de 4 journalistes -couronnés du prix Pulitzer- révélant le plus gros scandale de pédophilie aux Etats-Unis camouflé par l'Eglise catholique. En toute sobriété, Tom McCarthy restitue minutieusement cette affaire dérangeante et complexe au retentissement international et rend au journalisme d'investigation ses lettres de noblesse.
- Dans les locaux du Boston Globe, une équipe d'enquêteurs, baptisée Spotlight, se voit confier le dossier "John Goegan", une affaire non classée sur un prêtre accusé de viols sur mineurs. Très vite, le quatuor réalise que son cas et loin d'être isolé et ne représente que la partie visible de l'iceberg. Au total, 249 prêtres de la ville on agit pendant plus de 20 ans en toute impunité, couverts par les dirigeants religieux plus soucieux de protéger l'image de l'Eglise que la vie d'enfants innocents.
Avec une telle histoire entre les mains, McCarthy aurait pu tomber dans le sensationnalisme et nous livrer un blockbuster hollywoodien. Il n'en est rien. En misant sur la sobriété, le réalisateur crée une ambiance intimiste dans les bureaux reconstitués du Boston Globe. La mise en scène, la musique et les interprétations sont mises de côté pour concentrer toute l'attention sur le déroulement de l'enquête. Pas le temps pour développer des histoires secondaires. Avec un scénario précis et un récit clair, le film est suivi comme un documentaire par le spectateur qui se retrouve au coeur de l'investigation. De bout en bout, on reste captivé par les scènes prenantes et les discussions tendues.
Un vibrant hommage au journalisme d'investigation.
Avec Spotlight, le journalisme d'investigation retrouve ses lettres de noblesse. Le film rend hommage à un journalisme qui prend son temps et qui ne tombe pas dans la précipitation. A un journalisme qui oeuvre davantage pour la vérité que pour la retombée médiatique de ses sujets. Même l'ambiance "vieillote" et le décor vintage des locaux du Boston Globe -avec crayons en papier, calepins et ordinateurs imposants- nous replonge dans une époque où la transition numérique commençait à peine, éloignant le risque de tomber dans "l'info spectacle".
Dans la peau des journalistes, Michael Keaton (Birdman), Rachel McAdams, Mark Ruffalo (The Avengers) et Brian d’Arcy James nous livrent des performances admirablement justes. Ils ne sont pas représentés comme des super héros mais comme des super bosseurs. Ils ne sont pas de preux chevaliers mais des enquêteurs infatigables. Malgré les pressions de toutes sortes, qu'elles soient politiques, judiciaires ou religieuses, ils poursuivent inlassablement leur combat jusqu' à faire éclater la vérité en janvier 2002.
En bref, McCarthy nous rappelle l'importance de la presse dans un pays démocratique pour révéler les scandales et la nécessité de lutter pour une presse indépendante :
« Je souhaitais montrer l’impact du travail de journalistes d’investigation aguerris, qui ont permis à de révéler un scandale qui concerne l’ensemble de la société. Ce qui m’inquiète, aujourd’hui, c’est qu’il reste très peu de journalistes d’investigation par rapport à il y a une quinzaine d’années. Or, une presse libre incarne de toute évidence un contre-pouvoir vis-à-vis des institutions les plus puissantes. »