"J'aimerais que tout cela ne s'arrête jamais"
Haaa Spring Breakers et moi c'est une longue histoire d'amour. De détestation, à incompréhension puis à curiosité, ce film ne m'a pas laissé indifférent il faut le dire.
Ceci est un clip MTV désabusé. Est ce réel ou pas?
On ne peut pas resté indifférent face à toutes ces couleurs, ces lumières, ce jeu de caméra. Ce film est résolument esthétique, ce qui peut le qualifier de film contemplatif.
Nous suivons nos quatre héroïnes, pour lesquelles certains d'entre nous peuvent s'identifier: l'école c'est chiant, ma vie est ennuyeuse, je veux m'évader, faire la fête jusqu'à en mourir ect ect... Elles y parviendront, au rêve de tout jeune "occidental": le Spring Break. Mais la réalité les rattrapent aussitôt et le rêve tourne au cauchemar. Voilà, le scénario tient sur un mouchoir de poche. Mais le film ne tient pas qu'à son scénario et ses dialogues superficiels et simplistes.
Pourquoi le rêve tourne au cauchemar? Pourquoi sont-elles rattrapées brutalement par la réalité? Parce que la réponse est dans la première question. Ceci n'est "qu'un rêve". "Je crois que c'est un rêve". On est à cheval entre la réalité et le surréaliste. Des scènes particulières nous le rappelle: la scène du braquage, le tribunal avec ces 4 filles en bikini, la fin (au bord de l'Hollywoodesque). Comme si Korine voulait nous rappeler que tout ça n'est pas réel. Artificiel. Surréaliste. Une prend peur de la situation et part (la scène du bus est brutale, comme si la réalité venait détruire le rêve), une autre se prend une balle et elle aussi rentre chez elle. Et pourtant les deux restent. Attirées par ce faux gangster, brute dans la tête et roi du monde dans les films qu'il regarde (Scarface en boucle). On est aussi dans le monde de l'artificiel grâce au personnage de James Franco, erzast réussi de Riff Raff. Malgré toutes ses armes, tout cet argent, toutes ces belles paroles. La fin, quelque peu humoristique nous rappelle que ce "pur gangster" n'est qu'une image d'un rappeur blanc se voulant voyou parmi les voyous.
les appels à leurs mères sont toujours inscrits dans l'irréel: tout ce passe bien. On a rencontré des amis formidables. Tout est le contraire. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas réel
La scène du piano au son de Britney Spears est elle aussi surréaliste, décrochant complètement du film.
Mais c'est aussi un film purement beau, et ça je l'ai toujours défendu. Une photographie magnifique avec des couleurs éclatantes que l'on peut voir partout dans le film même dans des endroits insolites (l'amphithéâtre par exemple). Partout ces couleurs et ce filtre "Instagram" nous prennent l'œil pour magnifier le support visuel.
Bref, Korine réussit sans doute mieux que personne à écrire un film à l'image de la culture actuelle des jeunes de ce XXIe siècle. Une œuvre surréaliste où la forme devient le fond. Où le superficiel et l'artificiel remplace le réel et le concret. Certains se rêvent jeune fêtard "pour toujours" et d'autres rêvent d'être de vrais gangsters (ces rappeurs braquant des armes dans leurs clips alors qu'ils n'ont jamais tiré une seule fois).
Beaucoup (comme moi avant) mettent une mauvaise note en film, le prenant pour une blague, vide de scénario au limite du navet. N'est ce pas la réaction attendue par Korine? Le prendre trop au sérieux pensant à un film qui se veut vrai et tellement réel alors que finalement on va droit dans le mur? Certains (comme moi finalement) regardent le film de l'extérieur, comprenant que tout ceci n'est que rêve et surréalisme pourtant reflet de la génération.
Le rêve est beau et tentant mais "à chaque tentation, Dieu nous offre un échappatoire"