Jamais plus le cinéma ne sera un Art si grandiose

Quelque part ... À une époque inconnue ... Dans des paysages apocalyptiques angoissants ...

Règne le désespoir et la désolation ...
Peut-être est-ce le témoignage des ravages monstrueux de la technologie et de l'industrie ? Les conséquences des barbaries humaines méprisant la Nature ? Ou est-ce simplement les stigmates d'une terrible catastrophe passée ?

Toujours est-il qu'il existe une "Zone", un endroit mystérieux où il est strictement interdit d'aller. Protégé par des forces militaires, étroitement entouré de miradors et de barbelés, seuls des passeurs clandestins, les "Stalkers", osent s'y aventurer au péril de leur vie.

L'un de ses êtres à part entreprend un nouveau périple au coeur de la "Zone" accompagné par ses clients à qui il sert de guide : il y a un écrivain en quête d'inspiration et un savant en quête de vérité. Le Stalker, lui, espère secrètement la guérison de sa fille mutante.

Selon les rumeurs, l'épicentre de la "Zone" abriterait la "Chambre des Désirs", lieu de convoitise où tous les voeux les plus profonds et sincères peuvent être exaucés.

Mais la route est longue, dure, semée d'embûches dans ce vaste no man's land où la Nature a repris ses droits.

Imprévisible, changeante à tout moment, capricieuse, piègeuse et même mortellement dangereuse :
La "Zone" a ses propres règles qu'il ne faut surtout pas transgresser. Même le Stalker qui la connaît mieux que quiconque parvient à douter de sa propre connaissance de celle-ci.

Mais à quoi ça ressemble la "Zone" ?

Dans une Nature humide, brumeuse, glaciale et pleine de verdures : ce sont les Vestiges de la Civilisation.

Des ruines inondées.
De vieux égouts délabrés.
Des passages abandonnés.

Ce décor est le théâtre des quêtes spirituelles des personnages amenant une confrontation de différentes raisons de vivre et névroses existentielles. Les interminables pauses dans ce milieu hostile sont l'occasion de se questionner sur la foi, le sens de la vie, la raison ou encore la nature du désir, une véritable introspection dans les tréfonds de l'âme humaine.

En réalité, l'artiste Tarkovski nous invite avec cette oeuvre à vivre un voyage initiatique, au même titre que les personnages. Finalement, le Stalker n'est qu'une simple métaphore du cinéaste jouant le rôle de passeur entre l'Art et le Spectateur par l'intermédiaire de son œuvre. La dangerosité du passage dans la Zone n'est pas sans rappeler les terribles obstacles que dressent les autorités soviétiques sans cesse à Tarkovski dans son ambitieux travail.

D'abord dans un magnifique noir et blanc sépia, le brusque passage à la couleur quand les voyageurs entrent dans la Zone vient symboliser l'arrivée inespérée de l'espoir dans un Monde qui n'a plus foi en rien.

À la fois un austère poème de l'Apocalypse et une dissertation philosophique complexe toutefois passionnante. Ceux que cette complexité agace n'ont sans doute pas compris que ces dialogues servent simplement de stimulations intellectuelles pour se préparer à une expérimentation hors du commun.

Les espaces de flottement permettent de s'évader dans une rêverie à partir des images mouvantes proposées à l'écran. Une exploration visuelle et mentale proche de l'hallucination. Une contemplation et une écoute extatiquement troublante de la perfection visuelle et sonore. Une œuvre que l'on apprivoise, que l'on approche avec respect et qui demande beaucoup au spectateur.

Pour moi, il s'agît de l'Œuvre Ultime, l'Œuvre de ma vie ...

Celle que je n'oublierais jamais et qui restera à jamais gravé dans mon cœur et ma mémoire. Celle qui a changé ma vie et qui m'a bouleversé au plus profond de mon être. Celle qui m'a fait passer des moments inoubliables et qui me transcendera toujours. Chaque révisionnage apportera un éclairage nouveau, de nouvelles pistes de reflexions, de nouvelles fascinations, de nouvelles interprétations. Je découvrirais toujours de nouvelles facettes de moi-même et de nouvelles méditations sur notre Condition Humaine et le Monde qui nous entoure. Grâce à son potentiel inépuisable, ce film m'accompagnera tout au long de ma petite existence.

Une Œuvre qui s'élève au-dessus de toute l'industrie cinématographique. Une Œuvre au mysticisme rare dont ne ressort jamais indemne, ou plutôt dont on ne ressort jamais ...

Quel étonnement est le mien quand je regarde les classements des meilleurs films de tous les temps et que je n'y trouve pas "Stalker" ou dans le meilleur des cas pas à une plaçe décente. Peut etre y-a-t-il mieux me direz-vous ?

Le Parrain.
Citizen Kane.
Sueurs Froides.
Le Bon, la Brute et le Truand etc ...

Aucun de ses films n'est aussi ambitieux que "Stalker".
Aucun ne se questionne véritablement sur ce qui est le plus important : l'humanité et la vie. Aucun ne depasse vraiment le stade du divertissement.

Ô cher Andréï Tarkovski, si tu m'entend de là-haut.
Merci pour ce que tu as apporté au cinéma.
Merci pour l'estime que tu as du cinéma.
Merci pour tes exigences envers le cinéma.
Merci pour ton ambition demésurée.
Merci pour avoir surmonter la censure.

Quand j'aperçois le generique, je ne peux m'empêcher de pleurer en pensant que jamais plus le cinéma ne sera si grandiose !

Je ne saurais te remercier pour avoir élever le cinéma au stade du plus puissant des Arts ...
TheStalker

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