Contact mortel
Après Leonard Nimoy et William Shatner, c'est au tour de Jonathan Frakes de faire acteur-réalisateur pour un opus de Star Trek. Ici la terre est en danger, mise à mal par les Borgs, sorte d'être...
le 1 mars 2015
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Comment se faire des ennemis facilement, et ici, en 10 mots : "Vous trouvez pas que Star Trek : Premier Contact est surestimé ?"
Premier Contact est considéré comme le meilleur des films TNG et parfois mis au niveau de ses prédécesseurs, autant pour les fans que pour le grand public. Oui, sauf que moi je suis différent, et pas comme vous. La première fois que je l'ai vu, je ne l'ai pas particulièrement apprécié. La deuxième fois, j'avais les sept saisons de TNG au compteur et à ma grande surprise, j'ai été plus facilement happé. Cependant les impressions de mon premier visionnage se sont précisés.
Le script signé Braga et Moore, même duo que dans le premier film, partage les défauts de son prédécesseur : le spectateur novice est rapidement dans les choux. Posez la question à mon moi du passé, qui vous dit bonjour des tréfonds de ma mémoire. Il ne connaît toujours pas les personnages, et Premier Contact ne fait pas plus d'effort que Générations. Impossible de comprendre tout le passif de Picard avec les Borgs dans un rêve d'introduction mis là plus pour l’esbroufe que pour expliquer, difficile de prendre la mesure de la situation en une introduction trop expéditive où en dix minutes Picard transgresse les ordres lui disant de rester à l'écart pour partir au combat contre les Borgs - et le voir zigouiller cette si grande menace pour l'humanité en un tir ! Le fan service continue ses offices, le médecin holographique introduit dans Voyager qui en était à sa seconde saison, l'Holodeck où le novice se trouve confus de voir qu'on peut effectivement s'y faire tuer pour de vrai. Johnathan Frakes, l'acteur de Riker, réalise le film après avoir comme David Carson réalisé des épisodes de TNG. Il livre un travail sans odeur mais s'en dégage quelques bonnes séquences, probablement aidé par les décorateurs qui font un bon travail pour aménager l'ambiance mécanique d'une Enterprise rongée par l'electro-organique des méchants Borgs. Un réalisateur de talent aurait pu faire plus mais Frakes est efficace. Dommage que le film, là encore, oublie de créer un attachement avec l'Enterprise, le "foyer" des protagonistes, ce qui rend son invasion et sa corruption par l'ennemi un peu fade.
Envoyés dans le passé en poursuivant les Borgs, l'Enterprise arrive sur Terre la veille du premier contact avec des extraterrestres, avec à la clé les prémices de la Fédération. Ils ont deux missions à remplir : A – contrer les Borgs venus envahir l'Enterprise ; B – convaincre un alcoolique de terminer l'engin qui réalisera la distorsion spatiale prompt à la naissance de la Fédération. C'est mal ficelé, la tension qui devrait monter crescendo dans le récit de l'invasion Borg est constamment interrompue. L'intrigue B, bien plus légère, détruit la notion de claustrophobie et de siège dans le vide de l'espace pourtant primordial, et ce parce que l'intrigue B lui oppose bucolisme et comédie légère en grand espace. Le rythme en pâti puisqu'il se met en dents de scies. Résultat ces deux intrigues, qui n'ont en plus aucun lien thématique donc non-complémentaires, se marchent dessus. Mettre ces deux histoires en concurrence, c'est les mettre au même niveau, donner l'impression qu'elles ont la même importance et donc, la portée de l'un est abaissée par l'autre.
D'autant plus que l'intrigue des Borgs est mitigé. Revenons à mon moi du passé : lui s'est trouvé déçu que les Red Shirts se fassent assimiler par l'ennemi sans qu'on leur donne un tant soi peu de personnalité avant conversion – il était habitué aux Cybermen du Doctor Who de 2005 voyez-vous, qui avait pris cette peine. Comment prendre la mesure de l'horreur ? Comme en plus le passif de Picard avec eux est incorrectement résumé au début ça lui est bien dur de se passionner.
La série en avait déjà fait le tour en même temps. Du Le Meilleur des deux mondes à Lou, le Borg jusqu'à Descente aux enfers... Ouais non, pas Descente aux enfers. Mais Star Trek n'avait pas encore exploité le thème de la vengeance, et là c'est l'initié qui parle. Dans Lou, le Borg, les sentiments de Picard étaient bien plus subtils. TNG ressentait l'idée d'exploiter le traumatisme et la blessure intérieure plus que la vengeance. Le film se conformant à la volonté Patrick Stewart qui voulait un capitaine plus burné, on se retrouve avec une scène improbable où Picard se met à tirer sur les Borgs dans un cri guttural en mode Rambo. C'est écrit comme il faut, peuplé de bonnes scènes, cependant ça reste antinomique avec le personnage : c'est un homme cultivé, intelligent et diplomate, son arme c'est le mot subtil et pesant, pas la castagne imbécile, la vengeance est un gant trop petit pour lui.
Enfin Premier Contact a l'Idée Foireuse : la Reine Borg. La Reine Borg massacre tout ce qui fait du Borg une espèce fascinante. Le Borg est un collectif dépersonnalisé, dont l'objectif est d’assimiler pour survivre. Il ne pense pas, il assimile, c'est un objet sans cœur et sans scrupule, au-delà de toute considération personnelle. Créer une reine, et malgré les tentatives maladroites des dialogues pour nous faire avaler que c'est vachement plus compliqué que ça, c'est créer un chef. N'essayez pas de jouer la carte de la relativité en expliquant que l'un n'empêche pas l'autre : le Borg n'est désormais plus un individu sans visage qui pourrait être n'importe quel agent sans distinction, c'est la Reine qui les surplombe tous, et dont les Borgs sont, bon gré mal gré, rien de moins que des agents. A partir du moment où cette Reine s'adresse en se référant à elle-même, elle a une conscience, donc les Borgs ont une conscience.
Soi-dit en passant, il faut en plus se farcir ses dialogues pompeux de méchant supraordinaire tel « Tu ne penses qu'en trois dimensions ». Pour couronner le tout, les Borgs se voient adjoindre cet étrange objectif de la recherche de la perfection, superflu et même un peu caricatural. C'est un peu grossier pour une espèce qui gagnait à être implacable et avares en mots.
Pourtant le film m'aurait presque converti à sa cause. Les décors et costumes sont bien plus soignés, avec un œil plus franc sur le body horror à quelques rares moments, et les personnages sont bien mieux gérés, même si la femme qui sert d'invitée de circonstance sur l'Enterprise aurait pu voir son rôle accordé au docteur Crusher, qui a toujours été le confident critique de Picard.
Premier Contact fonctionne assez bien en tant que film d'action par contre, et si on oublie que Picard est pas crédible en Super Rambo ça laisse quelques scènes sympas dans le vide de l'espace et des effets spéciaux cools. Mais même si les Borgs sont classes c'est bourré d'erreurs qu'il n'aurait jamais fallu faire. Il a donc réussi à fâcher la fois l'initié et le novice que je suis ou étais, lesquels se sont concertés ensemble pour vous offrir cette critique autour de cette anomalie temporelle - on verra plus tard pour le moi du futur. Alors, c'est qui qui pense en trois dimensions ? Dans ta face, Q !
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Créée
le 29 déc. 2024
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