Je ne vais pas parler de la genèse de ce film, car il semblerait que cela ait déjà été fait.
Non, je vais vous parlez un peu de ce film émouvant et allégorique.
Pourquoi émouvant, me direz-vous?
Est-ce un drame lacrymal ?
Non.
Est-ce parce que l'un des membres de l'équipe technique est mort violemment ?
Toujours pas.
Undiscovered Country est en fait la fin d'une époque, l'achèvement de 25 ans de dur labeur pour maintenir à flot l'aventure Star Trek.
Lorsque Gene Roddenberry créée cet univers, il part de zéro. Alors scénariste de show TV à tendance policière, il se plait à imaginer un concept où l'équipage d'un vaisseau d'exploration spatiale, partirait à la découverte de civilisations sur d'autres planètes, et le tout, sous une aura pacifiste.
Il écrit un synopsis nommé S.S Yorktown - le nom du vaisseau vedette - et le propose à une petite société de production télévisuelle, Desilu.
Renommé Star Trek (qu'on pourrait traduire par "Exploration Stellaire"), un premier pilote est produit mais ne convainc pas.
C'est en 1966 que l'équipage tel qu'on le connait prend forme.
Et quelle forme !
C'est ainsi que nous y trouvons une mixité ethnique inédite à la télévision (je vous rappelle que durant les 60's, le racisme battait encore son plein, aux USA comme en France, d'ailleurs...):
-Hikaru Sulu (un Lieutenant Japonais, les souvenirs de la Seconde Guerre Mondiale sont encore tous frais),
-Pavel Chekov (un Russe élevé au grade d'Enseigne de Vaisseau, alors qu'on est en pleine Guerre Froide),
-Nyuta Uhura (une femme - déjà - mais qui plus est, Afro-Américaine et cerise sur le gâteau, elle a le grade de Lieutenant !).
Du jamais vu à l'époque ! Et tout ça, parce que Roddenberry croyait en un futur où l'Humanité montrerait enfin que nous tous, sommes juste une seule et même race: les Humains...
Bref, la série fut programmée, déprogrammée, annulée puis relancée sous la pression des fans.
Star Trek introduisit et démocratisa la science-fiction au grand public et ce, bien avant Star Wars*.
Décrivant le quotidien de l'équipage de l'USS Enterprise, le show emmène son public aux confins de l'Univers, à la rencontre de peuplade bigarrée croisée dans telle ou telle galaxie.
Je me souviens avoir découvert cette série au début de l'année 1983 et avoir été intrigué puis séduit par ce vaisseau spatial, son équipage cosmopolite, ses bizarres extra-terrestres et son thème principal...
Est-ce dû à la nostalgie de ces années-là, que je suis ému lorsque j'entend la musique d'Alexander Courage ? Peut-être, allez savoir...
https://www.youtube.com/watch?v=41ZDDXaHuwE
Humaniste et prônant la tolérance, Star Trek s'éteindra pourtant en 1969, victime d'une réalité autrement plus violente (émeutes dans les villes de Detroit, Los Angeles et Newark entre 65 et 67, assassinat de Robert Kennedy et Martin Luther King en 68, mouvement contestataire contre le conflit au Vietnam...).
C'est 10 ans plus tard que la résurrection de Star Trek arrive enfin...mais par la grande porte. D'abord prévu pour revenir à la TV, il est décidé que l'équipage de l'Enterprise ira explorer l'univers du cinéma, suite au succès fracassant de Star Wars.
La seconde vie de l'équipage classique, traversera les années avec plus ou moins de bonheur mais au moins, ils feront partie d'une certaine génération et ce, étalé sur 12 ans.
Le rapport du journal de bord de Kirk ( intervenant à la toute fin du film) est ainsi chargé d'une émotion non seulement inhérente à la retraite de son équipage et la sienne, mais aussi pour nous en tant que spectateur, qui venons de voir pour la toute dernière fois, l'équipage historique au complet:
"This is the final cruise of the Starship Enterprise under my command. This ship and her history will shortly become the care of another crew. To them and their posterity will we commit our future. They will continue the voyages we have begun, and journey to all the undiscovered countries, boldly going where no man... where no one has gone before."
Concernant le côté allégorique du film, il est aisé de deviner que sous la Fédération et l'Empire Klingon, se cache en fait les USA et l'URSS.
En effet, lorsque le film entrait en production, le Mur de Berlin venait tout juste de tomber et sous ses abords historiques de la fin de la Guerre Froide, il restait à savoir si cette fragile entente allait tenir la distance. Et si oui, jusqu'à quand ?
Tout cela semble lointain aujourd'hui, mais en 1990 - et après plus de 44 ans de crainte quant à une éventuelle 3ème Guerre Mondiale - c'était encore une peur compréhensible.
On y trouve aussi quelques allusions au nazisme (via le Général Chang) et quelques citations de Shakespeare (toujours du côté des Klingons) avait des sous-entendus toujours axé sur le IIIe Reich.
Ce qui - il faut bien le reconnaitre - est d'une richesse et d'une profondeur rare, pour un sixième film d'une franchise cinématographique, non ?
Cependant, l'humour - à petite dose homéopathique et pas appliqué à la truelle comme dans 8 ou encore Jean-Claude Convenant - est aussi présent, comme quand le Chancelier Klingon et sa suite sont transféré sur l'Enterprise et qu'ils font face à la délégation mené par Kirk, ou encore lors du combat de ce dernier contre la "Brute", sur Rura Penthe.
Les personnages sont égaux à eux-même:
-Kirk reste le franc-tireur qu'il a toujours été et Shatner s'implique toujours dans son rôle de prédilection;
-Spock conserve son attitude froide, mais "s'humanise" malgré lui, lorsqu'il reconnait que son arrogance a provoqué cette presque guerre totale, le regretté Leonard Nimoy restant le meilleur acteur de cet équipage,
-Doc McCoy est toujours aussi sarcastique mais profondément humain, interprété pour la dernière fois par un DeForest Kelley charismatique qui ne jouera plus dans aucun autre film avant sa mort, survenu en 1999,
-Sulu a pris du grade et est à présent lui-même capitaine de son propre vaisseau, récompensant le travail discret mais consistant de George Takei,
-Uhura est toujours un mix entre le quota féminin et une standardiste, malgré le fait de sa présence historique (dans tous les sens du terme) depuis le début, reflétant un peu le travail de Nichelle Nichols au sein de la franchise classique,
-Scotty reste le comique du groupe et semble toujours affairé à bricoler quelque chose, le regretté James Dohan et sa bonhommie habituelle,
-Chekov est toujours aussi accessoire, bien que prompt à être parfois l'élément comique, seul rôle marquant du sympathique Walter Koenig.
En guest-star, on y trouve pêle-mêle un Christopher Plummer en vil Général Chang adepte de Shakespeare, David Warner en Chancelier Klingon pacifiste, une toujours aussi charmante Kim Catrall en conspiratrice et un Clarence Boddic..., non, un Kurtwood Smith sous-exploité.
Pour finir, il est à noter que le score de Cliff Eidelman est tout bonnement exceptionnel de richesse guerrière, de noirceur et d'envolée lyrique émouvante, dans son End Credits.
https://www.youtube.com/watch?v=ro7YU342JUw
Live Long and Prosper through time, dear Enterprise's team !