Vu en salle en 2005, revu plus tard en DVD, et adoré les deux fois, Stay est un film dont j'avais pourtant un souvenir confus et dont j'aurais été incapable de vous raconter l'histoire. Après l'avoir revisité une nouvelle fois, sa structure labyrinthique et son onirisme surréaliste me rappellent pourquoi il est si dur d'en avoir un souvenir précis.
Le plus grand mystère, à mes yeux, c'est pourquoi le film s'est fait massacrer par la critique et fut accueilli avec une telle tiédeur par ses spectateurs. Je le trouve à la fois malin, audacieux et brillamment mis en scène, et je ne peux que supposer qu'il a été mal compris, et mal jugé.
De la même manière qu'un "Mulholland Drive", ou le fascinant "Enemy" de Villeneuve, Stay exige de son audience beaucoup d'attention et un peu de confiance. Ce n'est pas un film de second écran, ou un truc qu'on regarde en deux fois sur ses pauses déjeuner ou sur un téléphone. Le film vous demande d'accepter son ambiance étrange et d'avoir confiance en ses choix artistiques. Non, les interactions malaisantes et peu naturelles entre personnages ne sont pas un défaut d'écriture ou de jeu. Le montage non conventionnel et les effets de mise en scène ou de transitions ne sont pas des caprices flashy et gratuits. En substance, allez-y avec le cerveau allumé, et sans jugement hâtif.
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Si je regarde ses critiques outre atlantique, on a reproché au film ses effets de style "lourdingues" ou son esthétique de clip (avec toutes les connotations péjoratives que ça implique), alors qu'aucun de ces effets n'est gratuit et que tous participent à la fois aux thèmes et à l'expérience sensorielle que le film tisse avec soin durant sa petite centaine de minutes. Quiconque comprend son dénouement devrait alors saisir pourquoi telle ou telle scène était filmée de la sorte.
On lui a reproché d'être incompréhensible et de virer en surnaturel inopiné. Les deux déclarations confirment que ces critiques n'ont rien compris au script, qui n'est certes pas limpide, mais donne assez de clés pour être déchiffré avec un minimum de bonne volonté. Et honnêtement, je suis premier à éteindre mon cerveau en m'asseyant devant un film et en louper tout le symbolisme, donc ils n'ont vraiment pas fait d'effort.
Le casting est très agréable, avec Naomi Watts et Ryan Gosling qui n'ont plus rien à prouver et Ewan McGregor, que je suis toujours heureux de voir sur un écran. Ajoutez à cela une bande son magique, à mi-chemin entre Mothman Prophecies et Silent Hill (A Walk in the Rain) avec des tracks sublimes comme celle du final, et vous obtenez un mélange qui ne pouvait que me ravir.
https://www.youtube.com/watch?v=dmCfk5IFUgs
[SPOILERS]
Stay est un film à twist final, et c'était un plaisir de le revoir, car je me suis rendu compte à quel point le film donne toutes les clés, à la manière d'un 6ème sens, au risque d'éventer son mystère. J'ai aussi pu pleinement apprécier le basculement subtile et progressif dans une autre réalité, qui apparait d'abord par des transitions de plans étranges, des personnages en double ou en triple dans l'arrière-plan, qu'il serait facile de ne pas remarquer.
Il y a aussi un gros jeu sur les reflets, les effets de vertiges, les escaliers, des scènes qui bouclent. Tout contribue à nous mettre dans une ambiance onirique qui fonctionne parfaitement. Les transitions fluides et esthétisantes qu'on a pu reprocher au film sont dès lors absolument justifiées et ne sont pas des effets de style gratuit.