Steamboy par ALeuchat

Hier soir j'étais hyper content parce que j'ai enfin vu, après des années d'oublis, de remise à plus tard, que sais-je, Steamboy.
Et du coup ben forcément j'avais des super attentes parce que c'est super Ōtomo, dans ces manga ou ces anime, j'étais chaud bouillant..
Et bah j'étais pas déçue pour une fois! Incroyable!
C'est vraiment un film magnifique, ça me donne envie de pleurer et de dire à Kiki la petite Sorcière d'aller se rhabiller avec son Europe en carton. Ici on est chez Tissot, Constable, Millais, c'est si beau, c'est si vrai. L'équipe à complètement pris le parti de s'inscrire dans la culture et l'imagerie britannique du milieu du XIX siècle et c'est à tomber par terre. L'omniprésence des machines et leur design Eiffelien nous projette directement chez Jules Verne, c'est ultra généreux et sublime.
Ne serait ce que pour la beauté des décors ça vaut 100x le coup.
C'est peut être le film Steampunk le plus abouti que j'ai vu, enfin on dépasse le simple esthétisme et la technologie est pensée. On est ici dans une sorte d'uchronie en pleine Révolution Industrielle au moment de l'Exposition Universelle de Londres de 1851. Elle sera au coeur du scenario.
Comprenons nous : qu'est ce qu'une Exposition Universelle? Passée la carte postale nostalgique, elle est avant tout une manifestation de puissance. Foisonnantes durant ce siècle où la course aux colonies, comptoirs et autre terres minières était à son paroxysme, l'esclavage est le travail des enfants légal et où le droit du travail n'existait pas. Pas très jojo, pas très Charlie même. C'est aussi la grande époque où le capitalisme triomphe, prenant définitivement la main dans un nouveau monde libéral, productivisme, positivisme scientifique, la science peut tout, la machine peut tout, Dieu est mort.
BREF, l'Exposition Universelle est pure propagande de la puissance de l'Empire Britannique, de son avancée technologique et de sa puissance de tir.
Loin d'être manichéen, le film se tourne donc vers ce dilemme propre au XIXème siècle, la science, le progrès mais à quel prix? Et surtout, le progrès pour QUI?

La gauchiste que je suis était ravie! MAIS. Il y a un "mais"...
Nous avons deux partis très clairs, et l'intérêt du film est que Ray, notre héro, ne veut en prendre aucun. C'est très intelligent car ils ont tous les deux tort. Mais c'est là que le bat blesse.
Malgré ce sous texte très très intéressant, Steamboy est un film d'action qui donne la part belle à la baston dans des scènes extrêmement spectaculaires et animées comme de l'orfèvrerie. On ne s'ennuie pas mais il manque une tension, une enjeu dramatique qui me ferait m'accrocher à mon siège. Puisque les deux partis ont tort, on ne voit aucun intérêt à les voir se battre, Ray faisant office d'électron libre.
On aurait gagné à plus d'exposition, à plus de tension dramatique autour d'un dilemme et d'une trahison familiale éxistente mais qui n'est pas exploité (malgré l'évidence du thème de la filiation, pourquoi??). On aurait pu avoir un excellent drame philosophico-familial avec la touche de punch propre à Ottomo, les scènes d'action du début étant un régal, la baston finale disproportionnée.
C'était pourtant les ingrédients qui ont fait d'Akira un chef d'oeuvre...

On se demande si la faut n'est pas à un genre de "PG-13" tant l'usage des armes contre Ray étant condamné par les "méchants", le sang absent des champs de bataille et le comic-relief via des personnages secondaires un peu à la masse dans cette ambiance qui pourrait être beaucoup plus noire.

TL;DR
7/10, Excellent divertissement faute de mieux :(