« La fin justifie les moyens » est un proverbe bien connu mais comme rajoutait A. Camus « Si la fin justifie les moyens, qui justifiera la fin ? »… Ce commentaire camusien « va comme un gant » au film de Kilian Riedhof qui s’inspire la vie de Stella Goldschlag, citoyenne allemande juive vivant à Berlin en 1940 qui pour « sauver sa peau » (et celle de ses parents) à « accepter » de livrer activement à la Gestapo nombre de ses coreligionnaires. Son suicide en 1994 à l’âge de 72 ans (après une tentative ratée 10 ans plus tôt) démontre, sans ambages, qu’elle n’a pu elle-même justifier la fin, c’est-à-dire sa survie après tant de trahisons…
Ce sujet est rarement traité au cinéma. C’est souvent l’inverse qui est mis en image avec des « héros ordinaires » qui sauvent, dans des conditions éprouvantes, des juifs des camps d’extermination nazis. Et ce sujet est encore plus rarement traité quand le traitre est lui-même juif. Ainsi, « Stella, une vie allemande » ne peut que susciter l’intérêt de par sa particularité. Comme dans toute œuvre cinématographique, si le scénario est un élément à prendre en considération, ce qui en tant que spectateur nous fait vivre l’histoire qui y est relatée, réside dans la manière dont cette dernière est réalisée. Et c’est précisément à ce niveau que le « bat blesse ». Non pas que le film soit mauvais mais il est mal découpé et ce séquençage bancal entraine une certaine lassitude et frustration en tant que spectateur. Une première partie, trop longue, sans attrait particulier (pour le récit), décrit la vie à Berlin en 1940 et la montée des périls à l’encontre des juifs en amorçant, par petites touches, la psychologie de « l’héroïne ». Une seconde partie se situe 3 ans plus tard en 1943 (saut temporel révélateur d’une certaine « faiblesse » de la mise en scène), entre une nouvelle fois de manière très (trop) lente dans le « vif du sujet », c’est-à-dire le basculement de Stella vers la trahison. Enfin, une troisième et dernière partie, servant d’épilogue, que l’on pourrait presque qualifier de « bâclée » tant le temps utilisé (gâché ?) Lors du prologue ne permettait plus d’autres développements… D’ailleurs, cette impression de « course contre la montre » débute dès la moitié de la seconde partie avec de nombreux raccourcis escamotant l’approfondissement des transformations psychologiques de « l’héroïne », ce qui constituait pourtant le fondement de l’intérêt que l’on pouvait porter initialement au sujet.
En résumé, un « bon » film sur un sujet rarement traité mais qui manque d’envergure psychologique et dont l’organisation séquentielle serait à revoir.