Show must go home
Le grand bouleversement qui a terrassé l'industrie du divertissement, au cours de ces 30 dernières années, tient en deux points. La fin d'une certaine possibilité d'émerveillement serait presque...
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le 3 août 2016
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Et comme prévu ce n'est en fait pas très bon. Désolé Mr. Courtney, ce sera (peut-être) pour le prochain. Cette aventure de méchants luttant contre le mal (sic) ressemble a un film du même genre des années 90. A tel point que le scénario en reprend la structure (tout comme dans les animés et bandées dessinées du reste). Il s'agit de … New York 1997 de Carpenter ! Ceux qui aiment Carpenter sans connaitre les tomes papier de DC Comics vont être surpris. Il tente d'être culte également avec ses personnages haut en couleur et sa musique. Ce n'est pas une révélation : n'est pas Carpenter qui veut.
Comme c'est un film d'équipe, et de vilains au surplus, ce qu'il ne fallait surtout pas rater, c'est la distribution. Rien qu'en voyant la bande annonce, on pouvait constater que ce n'était pas gagné…
Cette phrase a été prononcée lors de l'entretien avec la troupe des acteurs du film donné au magazine Première, numéro de juillet-août, comme la précédente de Jai Courtney. En effet cela aurait dû être le cas et c'était justement la première condition à remplir pour un film qui mise sur un ribambelle de personnages, des méchants qui plus est, spécifiquement tirés d'un comic. Nous en sommes très loin, Mr. Smith. A commencer par Will Smith lui-même qui, certes, est dans le ton quand il joue l'émotionnel, les sentiments de papa envers sa fille, comme pour son fils dans A la Recherche du Bonheur, mais qui est en conséquence loin, mais alors loin, loin du personnage qu'il est attendu d'incarné : un tueur à sang froid.
Et c'est le premier et principal reproche à faire au film : il a clairement adouci le ton des comics et animés, n'empruntant pas le chemin ouvert par Deadpool en ce début d'année.
Autre exemple avec Captain Boomerang dont le côté raciste est en effet gommé, à la demande de l'acteur qui l'incarne. Tout comme la relation sadomaso d'Harley Quinn avec le Joker et bien entendu la dureté de Deadshot, cité plus tôt, remplacé par le côté un peu trop ''cool'' du Prince de Bel-Air. Les personnages autour d'Harley Quinn n'arrêtent pas de répéter qu'elle est folle, comme pour avouer que l'actrice ne fait pas passer cette folie à l'écran. On pourrait allonger la liste, ce serait vain. Car rien que ces quelques exemples suffisent à démontrer que les personnages ont été amputés d'une partie de ce qui fait d'eux des "super vilains". Au fond le seul personnage vraiment fidèle au papier et touchant à l'écran est El Diablo, qui apporte un brin de fraicheur notamment lorsqu'il raconte l'histoire de sa vie au bar. Il utilise son feu de manière poétique. Le seul moment ou la réalisation montre un véritable parti pris artistique.
Sans même lire la bande dessinée il est logique de penser que cette troupe de tueurs devraient se disputer entre eux et ne pas collaborer si facilement. Mais afin d'éviter le fameux R Rated aux Etats-unis, la production Warner l'a joué mollo et a ramolli l'ensemble des pas beaux. Pourtant Margot Robbie nous dit dans le même entretien : "Grosses personnalités, gros clashes". Pas du tout très chère.
Et le reste? Eh bien, comme le dit le réalisateur c'est surtout mauvais, même si le Bien intervient de temps en temps. Dieu soit loué.
Tout d'abord la musique, qui recycle un maximum de tubes connus des cinquantenaires jusqu'au nouvellement adolescents, se force à être cool. Du coup elle est moyenne car trop disparate, sans cohérence intrinsèque ou avec les images qu'elle est supposée soutenir.
Les costumes sont limites : le latex de Killer Croc est voyant, les collants crades de Harley Quinn en lieu et place de sa jolie combinaison noire et rouge font punk sur le retour, le côté sale de Captain Boomerang est étrange … En résume, le film donne l'impression d'avoir été tourné dans les années 90.
Il soulève aussi la même question que d'habitude : pourquoi prendre un acteur Africain-Américain pour jouer un personnage Caucasien au départ ? Ce qui serait acceptable. Sauf que comme presque toujours, cela est fait sans raison, sans justification artistique ou du scénario. Totalement artificiel donc. D'ailleurs Will Smith en est le champion après avoir fait notamment Wild, Wild West et Je Suis Une Légende, deux films pour le moins moyens. C'est peut être même la suite de la discrimination des acteurs afro-américains depuis qu'ils sont "le comique du film", "le meilleur pote" ou "le second couteau". Dans le même temps ils ne produisent que peu d'acteurs de la tramps d'un Denzel Washington ou Sidney Poitiers, il est vrai. Tout de même, on continue à les mettre dans des cases sous couvert de progressisme. Et en cassant des personnages construit dans les livres ou les bandes dessinées depuis des décennies. Vivement Black Panther, un vrai personnage africain.
Ici le paradoxe est à son summum car l'autre personnage Africain-Américain, Amanda Waller, est très bien choisie, correspond au comic, que ce soit sur son attitude, sa couleur de peau, son sexe et son style vestimentaire. Elle incarne bien cet agent du gouvernement qui fait jeu égal avec les détenus qu'elle embauche, en terme de perversion et brutalité. Merci Ms. Davis. Pourquoi ne pas faire comme pour elle concernant le reste de la distribution ?
Et je ne mentionne même pas Killer Croc …
A cette remarque Jai Courtney et Cara Delevigne objectent qu'eux, ils pourraient en manger tous les jours (toujours dans ce même entretien). Tout comme ils sont prêts à le faire avec leur régime alimentaire, ils nous servent toujours le même plat, le même numéro d'acteur. Bien sûr Mr. Hernandez, qui varie sa diète, est bien meilleur qu'eux deux. Réunis. Ne parlons même pas de Joel Kinnaman.
Reste de bons moments comme le moment ou Deadshot intervient dans la première véritable bataille. Et surtout les sorties littéralement enflammées de Diablo. Une blague par ci, par là. Un ensemble sans rythme, réalisé solidement et platement, au fond pas déplaisant mais qui décevra plus d'un fan. "Cela se regarde", comme on dit.
Au passage, à ceux qui se plaignent qu'on ne voit pas assez le Joker : c'est normal il ne fait pas partie de la Task Force X.
En conclusion : si vous voulez voir le Suicide Squad à l'œuvre, regardez plutôt Batman : Assaut Sur Arkham, deux fois moins long et deux fois mieux.
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Créée
le 4 août 2016
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