Suite Française, s'il n'est pas désagréable, n'a rien de marquant. Il ne suscite ni l'ennui, ni la véritable émotion. En somme, un film banal ?
L'impression dominante qui ressort de la vision de Suite Française est celle d'être passé à côté du coeur du sujet ; à savoir la situation délicate des femmes ayant eu une liaison avec un Allemand durant l'occupation. La problématique est réduite à peau de chagrin, et la tension entre l'amour naissant et le patriotisme est à peine exploitée.
Suite Française bénéficie d'une réalisation presque trop soignée. Les rues de Bussy manquent cruellement d'authenticité, des marques du temps et du bordel émietté par la vie quotidienne. C'est un beau village soigneusement épousseté. Passée la surprise d'entendre des accents britanniques à qui mieux-mieux, on est plus surpris par la toilette apprêtée de Ruth Wilson la paysanne (qui joue pourtant bien) ou encore la quasi-absence de violence psychologique. Difficile de nous croire dans un village français sous l'occupation allemande, mais heureusement qu'on nous le précise.
Matthias Schoenaerts fait montre d'un jeu remarquable, tout en nuances. Michelle Williams ne l'égale pas, elle semblait aussi perdue que son personnage, ce qui, au final, la sert peut-être. Les seconds rôles sont plus que corrects.
La bonne surprise reste que Suite Française ne verse pas dans le mélodrame. On a droit à un peu plus qu'une simple histoire d'amour ; les autres personnages viennent étoffer un peu la trame du récit, même si cela n'est exploité qu'assez superficiellement.
La fin est rapidement expédiée (mais c'est à mettre sur le compte de l'oeuvre inachevée dont le film est tiré), cependant la dernière scène (fuite dans la voiture) est réussie pour ce qu'elle montre de la relation entre les deux personnages principaux, et leurs chemins de vie respectifs.
Un qualificatif pour ce film : lisse. A vouloir réaliser avec élégance, on perd l'imperfection de la réalité. A vouloir rester sage, on se cantonne à la surface des sujets, sans jamais creuser assez pour extraire ce qui aurait (peut-être) fait de Suite Française un peu plus qu'un divertissement agréable.