Une chronique à taille humaine
Ce qui frappe en premier lieu à la vision de "Summertime", c'est le charisme impressionnant et authentique des acteurs : ils percent l'écran et happent les spectateurs dans la diégèse. De ce point de vue, le casting des deux enfants (qui jouent Robbie et Fess, les personnages principaux, et dont c'est le premier tournage) est une incroyable réussite, surtout lorsque l'on connaît la difficulté de réussir un film autour de l'enfance et de l'adolescence.
L'esthétique de "Summertime" est également travaillée (plans rapprochés, présence brute des corps...) : on sent la crasse et la sueur. La mise en image est sensuelle et suave : les plans larges sur la nature et la bande-originale renvoient au monde intérieur de Robbie qui, du haut de ses 14 ans, doit prendre en main sa famille (sa grand-mère mutique, son demi-frère qui l'est presque tout autant) et faire avec l'absence de sa mère (partie pour "essayer d'aller mieux").
On plonge dans cette Amérique de l'envers, de la désillusion et de la fatalité (pour ces gamins, c'est "no american dream"). On sent bien toute l'influence du travail documentaire qu'avait mené jusqu'alors Matthew Gordon, le réalisateur. Pour le spectateur, c'est une véritable immersion : pendant 1h15, on vit avec ces gosses dans ce Mississippi déshérité. Et malgré cette ambiance désespérée, le propos de cette chronique traite de la conquête du bonheur et de l'espoir, pas à pas, grâce aux relations humaines et fraternelles. Les rapports entre Robbie et Fess, et Robbie et Lucas (le grand-frère qui débarque de temps en temps) sont d'ailleurs d'une densité et d'une intensité peu communes au cinéma.
Un très beau film, qui gagne à être vu et partagé, et qui laisse rêveur quant aux futures réalisations de Matthew Gordon.
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