Sauvez un Marsupilami, mangez un jardinier.
Après avoir collaboré avec Jamel Debbouze dix ans auparavant dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre (2002), Alain Chabat remet le couvert en réalisant, produisant, et écrivant son tout nouveau film : Sur la piste du Marsupilami. Au premier abord et au vu de la bande-annonce, le film paraît bidesque à souhait, voire nanardesque, avec un humour fait pour les gamins de six ans et un Marsupilami massacré. Cette bête affreuse, avouez-le, ressemble-t-elle au Marsupilami de votre enfance ? Définitivement non. Bref, tout semble fait pour que personne sauf les enfants et les pauvres parents traînés de force dans les salles obscures aillent le voir.
On retrouve alors un Alain Chabat (Dan Geraldo, dans le film) en journaliste sur le déclin, et un Jamel Debbouze (Pablito Camaron) en vétérinados escroquos avec beaucoup d'enfants et un gros Kiki, son perroquet. Je tiens tout d'abord à dire que le Marsupilami est, fort heureusement, mieux modélisé que dans la bande-annonce, et beaucoup plus mignon. En résumé bref, Dan Geraldo, journaliste de renom, doit partir en Palombie faire un reportage choc sur les Payas, un peuple ayant acquis une longévité incroyablement longue par un mystère que notre cher Geraldo devra percer. Tout juste arrivé en Palombie, où celui-ci doit se faire guider au coeur de la forêt rencontrer les Payas par Pablito Camaron, Dan se fait embarquer par un Patrick Timsit en Caporal de l'armée du dictateur général Pochero, lequel est non sans rappeler, avec sa moustache et son air con, le célèbre chasseur du Marsupilami. L'histoire s'emballe ensuite, avec un botaniste fils de la femme de ménage d'Hitler (S.S in Uruguay...), un Lambert Wilson en dictateur fan de Céline ("Fasciste !") Dion ("Autiste !"). Bien que le scénario ne suive absolument pas la bande-dessinée, on se laisse bercer relativement bien au gré des péripéties, même si la vue d'ensemble est assez fouillis. En effet, le scénario n'est pas très clair et on ne comprend pas vraiment le déroulement de la situation lors des premières 20-30 minutes du film. On s'étonnera également que la chasse du Marsupilami, élément pourtant central dans l'oeuvre de Franquin, n'ait pas lieu à proprement parler. L'univers de la BD, bien que respecté dans son ensemble, subit quelques entorses. Adieu donc ce cher Bring M. Backalive (le chasseur du Marsupilami, pour ceux qui ne s'en rappelaient plus), et bonjour Fred du SAV des émissions incarnant un botaniste fou. Cependant, on retrouve beaucoup d'éléments fidèles à la BD : le Marsupilami grand amateur de piranhas, le nid suspendu, les oeufs en forme de poire, etc. Concernant les décors, la ville sera particulièrement réussie et très représentative de la vision de Franquin. Pourtant, on regrettera fortement que les décors lors des scènes dans la jungle paraissent extrêmement factices, et de fait absolument pas réaliste. On se retrouve alors avec des fougères en plastiques qui sautent aux yeux, une jungle confinée où l'on devine sans problème la petitesse du studio, et parfois des arbres au tronc lisse comme un oeuf. Mais venons-en aux faits : le film est-il réservé aux gamins ? Encore une fois, la bande-annonce nous trompe, et on retrouve un humour Chabatiesque dans toute sa splendeur. On sourira lors des vannes faciles, connes, mais qui font cependant toujours mouches, on rira devant des gags qui rappelleront l'humour des Nuls, et on s'émerveillera devant la myriade de références que nous offre Alain Chabat et que ces cons de gamins qui ne pigent rien ne comprendront pas (voilà, c'est dit). On pouffera de rire devant la référence à Avez-vous déjà vu ?, et on soufflera du nez lors des clins d'oeil à Questions pour un Champion ou Rambo. Finalement, l'humour du film s'adresse plus aux adultes qu'aux enfants, ceux-ci riant au simple comique de situation cruellement classique (X tombe dans un trou, Y se fait mal, etc.), mais qui ne pourront pas apprécier les blagues "de grands", le LSD, Lambert Wilson, et la grosse queue démesurée de la bête féroce vêtue d'une fourrure léopard. Oui bon c'était facile, mais il fallait bien que je la place à un moment ou à un autre.
Le script est classique de Chabat : des vannes lourdingues rappelant sa période des Nuls, d'autres plus subtiles faisant appel à de la simple culture générale. En fait, tout cela sera non sans rappeler étrangement Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, mais en moins drôle.
La bande originale du film, bien que pas folichonne (des tambours pour un film qui se passe dans la jungle, creativity motherfucker !), reste tout de même sympathique à écouter. Elle ne sublime pas le film, mais, au moins, elle ne le rend pas moins bon. Les bruitages, eux, renvoient aux classiques des dessins animés du début des années 2000 (justement à l'époque où les dessins animés français du Marsupilami passaient). Bon point donc pour Chabat, qui réussit à placer des bruitages de ce style dans un film sans que cela devienne vraiment trop lourd.
Concernant le jeu d'acteurs, on retrouve un Alain Chabat au top de sa forme, qui a fait de ses mimiques et de son attitude une marque de fabrique qui font toujours mouche et nous rappellent la tendre époque de Didier ou de La Cité de la Peur. Idem pour Debbouze, même si celui-ci semble s'être assagi avec le temps. Plus de façon de parler lourdingue à la Mission Cléopâtre et un personnage un peu plus mûr mais qui fait toujours rire. Tant mieux. Fred Testot garde quant à lui sa gestuelle propre au SAV des émissions, et ma foi, ça marche pas trop mal, même si cette même gestuelle est extrêmement tournée vers le public très jeune à cause de la surenchère excessive. Patrick Timsit, lui, bien que s'étant très clairement inspiré de Backalive, voit sa présence tristement effacée par Fred Testot. Et enfin, the last but not the least, on se régalera de la prestation de Lambert Wilson, qui réussit à sublimer chaque scène dans laquelle il apparaît, et à nous offrir les moments les plus drôles du film.
En conclusion, Sur la piste du Marsupilami, même s'il risque d'être très vite effacé par le prochain Astérix et Obélix, restera un peu dans les mémoires pour les quelques gags mémorables du film. Un petit film sympathique, clairement pas à la hauteur d'Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, mais qui donne une petite bouffée d'air frais grâce à la nouvelle collaboration du duo Chabat-Debbouze. A voir, mais pas à se précipiter dessus non plus.