Il s'agit ici d'un film en forme d'œuvre social durant les années 50 qui soulève les problématiques des classes ouvrières les plus pauvres comme l'avait fait aussi Visconti pour l'Italie avec la Terra Trema par exemple. Marlon Brando joue le rôle d'un "bum" (clodo) comme son personnage le dit de lui-même. Le film sort à la fin de la période Maccarthyste et on peut y voir un pamphlet contre cette doctrine. C'est bien évidemment aussi une dénonciation des syndicats d'ouvriers qui se comportent comme des gangsters.
Brando interprète son rôle avec justesse en passant d'un sentiment à un autre avec aisance, en passant du statu d'anti-héros à celui de héros et de symbole. Son face à face avec Eva Marie Saint (quel nom ! Elle aurait du avoir le rôle du prêtre…) est celui de la Belle et de la Bête dans un contexte social (et pourtant aucun rapport avec La Belle et Le Clochard). Une romance presque impossible donc, à la Roméo et Juliette. En effet leurs "familles" et leurs actes les séparent. Il est brutal et viril, elle est intelligente et déterminée. Elle croit en la gentillesse et la patience et lui dans la survie. Tout les oppose et tous les réunit.
Le personnage principale du film au fond, c'est le mort du début de l'histoire, qui plane au dessus de tous et comme il était un homme bon ne peut partir sans que lui soit rendu justice. Il y a quelque chose de l'ordre du karma, du divin.Et cette justice divine prend forme humaine sous les traits de Karl Malden, prête moderne, qui fume, qui boit, qui cogne et qui sermonne.
On est aussi admiratif devant le talent de Kazan pour faire le portrait d'un prêtre bien loin des clichés mais ancré dans le réalisme d'une époque difficile, d'une situation sociale insupportable.
Sur la plan allégorique, il se permet tout du long une comparaison opportune avec les pigeons qui marche d'autant plus en anglais à cause du terme "stool pigeon". Je n'en dis pas plus pour vous laisser découvrir la comparaison animalière qu'il fait.
On The Waterfront est une œuvre belle et classique, sulfureuse et pourtant héroïque. Un classique à voir autant pour son thème que pour sa réalisation et sa distribution.

Créée

le 10 mai 2015

Critique lue 363 fois

Fiuza

Écrit par

Critique lue 363 fois

D'autres avis sur Sur les quais

Sur les quais
Sergent_Pepper
7

Wrongs for the deaf

Fort du succès d’Un tramway nommé Désir, Kazan renouvelle l’aventure avec Brando. Il s’agit désormais d’ouvrir les cloisons de l’adaptation théâtrale et d’embrasser la ville, ou plutôt un de ses...

le 5 juin 2019

40 j'aime

2

Sur les quais
Vincent-Ruozzi
9

Le film aux 8 oscars

Sur les quais la vie est dure. Chaque jour l’injuste ballet se répète. Trop peu de bateaux viennent décharger leur cargaison dans ce port de New-York où les hommes s’agglutinent de bon matin pour...

le 19 mars 2016

39 j'aime

3

Sur les quais
Docteur_Jivago
10

Le Chemin de Croix

J'aurais pu avoir de la classe, j'aurais pu être un champion. J'aurais pu être quelqu'un au lieu de n'être qu'un tocard, ce que je suis, il ne faut pas se leurrer. En signant Sur les Quais,...

le 20 avr. 2014

31 j'aime

7

Du même critique

Thor: Ragnarok
Fiuza
4

On frôle la ca-Thor-strophe

Avertissement : ce texte peut contenir certaines révélations sur l'intrigue du film Thor 3 est un film qui ne manque pas d’humour. Et c’est là le principal problème. En effet, pratiquement chaque...

le 25 oct. 2017

60 j'aime

4

Westworld
Fiuza
5

A l'Ouest d'Adam … rien de nouveau

Après l'épisode 1 (note 8) Jonathan Nolan revient avec une série où lui et son équipe développent les thèmes qu'il aimait déjà dans Person of Interest. Intelligence artificielle, pouvoir caché,...

le 8 oct. 2016

39 j'aime

16

Mademoiselle
Fiuza
1

M*rdemoiselle 

Propos liminaires Double avertissement à mes aimables lectrices et lecteurs : ce texte est plus un avis argumenté, un genre de tribune, qu'une analyse critique. J'ajoute que des parties de l'œuvre...

le 22 nov. 2016

32 j'aime

22