Sorti en pleine période de maccarthysme, On the Waterfront s'inscrit parfaitement dans son époque mouvementée. Elia Kazan nous offre une nouvelle fois une image très critique de la société américaine de cette période.


Sur le papier, le film a tout pour séduire : une histoire de pègre dans un milieu de dockers, doublée d'une amourette qui amène notre héros ultra viril à se remettre en cause et se poser des questions pour la première fois de sa vie. On trouve un Marlon Brando des grands jours qui incarne un boxeur frustré en quête d'une vie simple (du travail régulier et un petit apéro de temps à autre, rien de plus).


Ce film présente tout de même une certaine singularité dans l'ensemble de l'œuvre du réalisateur engagé puisqu'on décèle une influence très claire du néoréalisme italien dans cette description minutieuse de l'environnement violent que constituent les quais. On comprend mieux les raisons pour lesquelles les conservateurs n'ont pas apprécié le message émanant de ce film. Les hommes se battent afin d'obtenir un jeton de travail, perdant dans le même temps toute dignité. La religion n'est plus quelque chose de sacrée, les hommes n'ont plus foi en elle depuis visiblement très longtemps.


C'est pourtant un destin individuel qui va faire basculer le rapport de force puisqu'il faudra que le personnage incarné par Marlon Brando soit, tel Lazare ressuscité par Jésus, d'abord mis à terre avant d'unifier les travailleurs et renverser l'ordre social établi.


Si la mise en scène frôle la perfection, Elia Kazan demeure un réalisateur marqué d'un très grand classicisme, ce qui est parfois quel que peu regrettable. On retrouve ainsi lors d'une scène romantique sur les toits une musique bien mièvre et beaucoup trop prononcée. Le développement de l'action et le symbolisme sont intelligents mais tout est bien trop didactique, ce qui réduit d'autant le plaisir du spectateur.


A l'image de la situation des Etats-Unis de l'époque, pays divisé, suspicieux et en plein doute, c'est un véritable questionnement sur la famille, l'ambition et le modèle capitaliste que nous offre Elia Kazan.

Kevin_R
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films des années 1950 et Les meilleurs films avec Marlon Brando

Créée

le 27 févr. 2016

Critique lue 282 fois

1 j'aime

Kevin R

Écrit par

Critique lue 282 fois

1

D'autres avis sur Sur les quais

Sur les quais
Vincent-Ruozzi
9

Le film aux 8 oscars

Sur les quais la vie est dure. Chaque jour l’injuste ballet se répète. Trop peu de bateaux viennent décharger leur cargaison dans ce port de New-York où les hommes s’agglutinent de bon matin pour...

le 19 mars 2016

39 j'aime

3

Sur les quais
Sergent_Pepper
7

Wrongs for the deaf

Fort du succès d’Un tramway nommé Désir, Kazan renouvelle l’aventure avec Brando. Il s’agit désormais d’ouvrir les cloisons de l’adaptation théâtrale et d’embrasser la ville, ou plutôt un de ses...

le 5 juin 2019

39 j'aime

2

Sur les quais
Docteur_Jivago
10

Le Chemin de Croix

J'aurais pu avoir de la classe, j'aurais pu être un champion. J'aurais pu être quelqu'un au lieu de n'être qu'un tocard, ce que je suis, il ne faut pas se leurrer. En signant Sur les Quais,...

le 20 avr. 2014

31 j'aime

7

Du même critique

Les Évadés
Kevin_R
5

Under Control

Si la réalisation de The Shawshank Redemption est marquée par un très grand classicisme, ce défaut d'originalité permet néanmoins au récit de se dérouler sans véritable accroc dans le rythme. Les...

le 8 mars 2015

21 j'aime

4

Les 8 Salopards
Kevin_R
3

Les 8 insupportables bavards

Au regard de l'accueil critique très favorable de la majorité des spectateurs, il me semble d'abord nécessaire de prouver ma bonne foi avant tout propos. J'ai découvert Quentin Tarantino alors que...

le 10 janv. 2016

20 j'aime

3

Les Sept Samouraïs
Kevin_R
9

You'll never walk alone

Œuvre quelle que peu à part au sein de la filmographie de Kurosawa, Les Sept Samouraïs constitue pourtant l'un des ses plus grands films. Le long-métrage interpelle d'abord par son apparente...

le 28 févr. 2015

11 j'aime

6