Décidément, les films sociaux, c'est pas mon truc. J'essaie de temps en temps. Et parfois j'en trouve qui me plaise, comme certains Dardennes, j'ai par exemple aimé le fils, mais ce film n'est pas que social, ça raconte aussi l'histoire d'un père, d'un deuil. En revanche, ce film-ci met trop l'accent sur la misère du monde et ça m'ennuie. Ca m'ennuie surtout parce que, le discours, au final, me paraît trop simpliste. On pointe le doigt sur un système défaillant, on blâme ceux du dessus, on crache sur un gouvernement qui ne met rien en oeuvre pour aider son peuple... mais, au risque de me faire passer pour l'avocat du diable, je pense que le problème ne se situe pas juste à ce niveau là. C'est plus compliqué. Alors dans un film d 'action ou un thriller, ça me va qu'on accuse le gouverneur de corruption, mais ici dans un film social qui se veut un discours plus élaboré, je trouve ça facile. Même si Ken Loach ne s'adresse pas directement envers le gouvernement, on sent bien qu'il leur en veut, qu'il considère que ses personnages auraient pu s'en sortir autrement avec une meilleure assistance. Bon, je constate que moi même je ne pousse pas très loin ma critique, que je n'y connais pas grand chose en politique, et puis surtout la morale, même si elle ne me convient pas, n'est pas un argument suffisant, à mon avis, pour apprécier un film.
C'est donc vers le scénario que je me tourne. Je suis déçu parce que les personnages sont un peu des caricatures ambulantes, et leurs décisions n'offrent aucune réelle surprise. Le coup de la caravane est tellement évident. Le rouquin rejeté pareil. La mère à la fin... Tout ça n'est que trop prévisible. Et l'histoire? Ben c'est assez vide. Au delà du message que je n'aime déjà pas, je n'ai pas trouvé grand chose à me mettre sous la dent, comme si Ken n'avait que sa gueguerre à mener, en s'en fichant de raconter une histoire. On voit un gosse qui a un bon fond et qui essaie de s'en sortir. L'objectif n'et pas tellement mis en avant, on s'intéresse plus à la vie de ce gosse, à un cinéma réel quitte à sacrifier une véritable narration. Il ne se passe donc pas grand chose, il n'y a pas vraiment de conflit, tout se résoud très vite. Par exemple lorsqu'on propose au jeune héro ce contrat malsain dans les toilettes, ça semble être l'occasion d'une bonne ambiance, d'un bon suspens mettant en avant les conflits internes du jeune garçon... mais non, au lieu de ça, il s'exécute très vite, on fait l'impasse sur sa psychologie. Peut être que ça se serait passer comme ça dans la réalité, je ne dis pas le contraire... sauf qu'au cinéma ça ne marche pas pareil. S'il n'y a pas tout un travail de mise en scène, qu'on se contente d'imiter le réel, alors ça m'ennuie parce que ce n'est plus du cinéma (je précise que pour moi la nouvelle vague est bel et bien du cinéma, car on jour avec le montage, avec les caractéristiques du médium). Voilà pourquoi je n'ai pas aimé ce film. Et pourtant il y avait des thématiques qui m'intéressaient, comme cette rivalité père-fils vis à vis de la mère. Mais on ne met jamais l'accent dessus, et ce n'est jamais montré comme un conflit, juste une menace, c'est différent : la menace, on peut l'oublier (et c'est ce qu'il se passe pendant la moitié du film, on ne montre plus le père) ; un conflit par contre c'est quelque chose à résoudre en quelques plans et qui pèsent sur le héros (ce qui ne veut pas dire quelques secondes).
La mise en scène n'est pas géniale non plus. Ken Loach ne cherche pas à utiliser sa caméra de façon cinématographique, son parti pris c'est d'être réel, il ne cherchera donc jamais une mise en scène mettant en avant les caractéristiques de son médium. Ainsi tout reste simple. On filme comme on peut. On peut tout de même le remercier de ne pas agiter sa caméra comme un épileptique vu que c'était un peu la mode en 2002, par conséquent, l'action reste toujours simple et fluide. Mais c'est pauvre. Je ne cherche pas des plans séquences à la Spielberg qui ne veulent rien, dire, juste une exploitation du médium. Même la caméra des frères Dardennes joue un rôle important dans la construction de leurs films, et je dis ça sans être un grand fan de leur cinéma. Ici rien, Ken se contente d'être clair. C'est bien, c'est appréciable de faire cet effort, mais ça ne me suffit pas, je n'ai pas eu l'impression de regarder du cinéma tant le médium en soi est peu exploité. En fait, ce qui m'embête c'est que, tel quel, je ne vois pas l'intrérêt d'en avoir fait un film. Un roman aurait été plus efficace. L'aspect visuel n'apporte rien au film.
Bref, Sweet sixteen m'a ennuyé, vous l'aurez compris. Ce n'est pas une bouse infâme grâce à un minimum de maîtrise technique et un minimum syndicale dans l'écriture (on a un début, un milieu et une fin), mais le tout me semble faible, déjà vu et revu, sans jamais amener un regard neuf sur la chose. Je n'abandonne pas pour autant le film social, j'aime le cinéma et j'aimerais bien aimer ce genre aussi. Non je n'abandonne pas!