Tatami
7.5
Tatami

Film de Zar Amir Ebrahimi et Guy Nattiv (2023)

L'Iran et sa révolution qui porte un nom, celui de toutes ces femmes qui choisissent de se battre et de lutter, afin de ne jamais oublier de défier l'histoire et son pouvoir.

Face à ce paysage toujours gris, on perçoit le son d'une voix venant d'ailleurs, qui voyage en quête de liberté. Emprisonnées dans ce noir et blanc monotone, qui règne en maître. Vêtues d'un voile qui les rend prisonnières d'un monde qu'on leur refuse, et qu'elles rêvent toutes de voir un jour s'envoler. Au souffle d'un vent de liberté, plein de couleurs et d'envies de danser.

C'est le combat de Leila Hosseini (Arienne Mandi), une judoka au destin en or, et de son entraîneur Maryam (Zar Amir Ebrahimi), qui ne la quitte pas des yeux. Deux femmes qui portent en elles tout un pays. Une politique et son emprise invisible qui les observe.

De victoire en victoire, de marche en marche, la propagande iranienne s'intensifie, lorsque l'ennemi juré se dessine : Israël, et son apartheid en Palestine. Ce refus complet et total de normaliser les relations avec un pays que l'Iran ne reconnaît pas.

Un combat impossible pour un impératif clair, et un choix difficile, quand Leila et son entraîneur se regardent, marquées par la révolte et l'espoir. Mais aussi par le regard du renoncement, quelque chose entre elles qui s'éveille, lorsqu'elles ne sont plus que les figures d'une force savamment orchestrée.

Leila, qu'on cherche à faire abandonner à nouveau, à des fins politiques. Une athlète devenant ainsi une cause contrainte qui la dépasse.

Zar Amir Ebrahimi et Guy Nattiv offrent un beau film, en quête de sens dans cet espace carré, au sentiment claustrophobe. Une recherche d'essentialité, racontée clairement, sans digression. Emporté par l'intensité des mouvements, entre un désir de gloire personnelle et de justice, pour mieux s'opposer et remettre en cause le mal d'un système autocratique qui n'a apporté que souffrance et malheur. Ou bien se perdre à jamais et retourner à une soumission silencieuse. Le choix d'une vie.

L'intention du Tatami est plutôt réussie. Le judo est devenu le porte-parole de toutes ces femmes. Une forme d'art personnel et collectif qui unit les pays, et communique certaines valeurs de fraternité.

Un message loin des médailles, montrant le sport iranien qu'on utilise sur l'échiquier mondial pour envoyer des messages. Leila symbolise à la fois le courage et le fruit du désespoir par ce cri à s'en fracasser le crâne. Une scène qui nous amène à réfléchir sur nous-mêmes et sur ceux qui nous entourent, la chance de vivre en France.

Pendant que le guide suprême continue de contrôler les âmes et les corps de toute cette jeunesse iranienne, par peur de voir tous ces destins trouver le chemin de s'enfuir. Vivre et briser les chaînes d'un ciel qu'ils ne pourront plus obscurcir. Un trône qui s'effondre, et c'est la lueur d'une aube nouvelle pour le combat d'une vie, face à un État fort de ses structures et de sa détermination, qui ne cédera pas ainsi.

Rolex53
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John Rolex

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