Peut-être le « Raging Bull » iranien...
J’ai eu un peu peur au début du film par le choix formel du 4/3 et du noir et blanc. Peur d’une posture et d’une artificialité esthétique. Mais je me suis trompé et tant mieux ! Cela sert complétement le récit et la mise en scène. Avec comme effet produit un sentiment d’aliénation et d’étouffement qui s’intensifiera tout le long du récit jusqu’à une scène de libération qui passera par une libération du corps. Une des scènes les plus inspirées et intenses du film. Je trouve néanmoins que la beauté graphique du noir et blanc de « Tatami » n’est pas époustouflante et n’atteint pas celle d’un « La nuit du chasseur » ou du plus récent « Les olympiades » de Jacques Audiard, mais a demeuré tout de même très plaisante à mon regard. Par exemple, le noir absolu du public vient d’autant plus isoler Leila. J’ai notamment apprécié l’utilisation de la musique qui n’est pas omniprésente et sait se faire entendre quand il le faut. Le fim passe par beaucoup de stéréotypes du genre et scènes faussement « obligées » mais en y apportant une certaine subtilité et originalité de par le propos féministe et géopolitique. Cependant, j’ai eu quelques problèmes avec la narration et la construction des personnages. Je trouve que « Tatami » prend du corps et son envol réellement dans la seconde partie. Le montage alterné avec des retours en arrière pour recontextualiser la situation et donner du poids aux personnages ne m’a pas transcendé. De plus, les conflits internes et moraux des protagonistes passent presque uniquement par des faits scénaristiques. Des personnages manichéens, hormis l’entraineuse qui est à mon avis le personnage le plus intéressant, car le seul personnage doutant réellement de sa moralité. Cela vient peut-être en partie du jeu incroyable de l’actrice, comme retenu dans sa rage. De la complexité. C’est ce qui m’a manqué grandement dans ce film pour vraiment l’adorer et me marquer durablement. Le film montre et dit des choses sur le monde (et c’est déjà énorme car plutôt rare). Des banalités qui sont vitales d’êtres montrées mais dommage de ne pas être allé plus loin à mon avis.
Malgré certaines réserves, j’ai beaucoup aimé « Tatami », je le conseille vivement ! D’autant plus que c’est toujours intéressant et fondamental selon moi d’aller questionner des films de pays dont on n’a peut-être pas l’habitude de rendre visite cinématographiquement, histoire de se renseigner sur l’état du monde par le point de vue sensible d’un ou d’une cinéaste (ou deux ici).