Lutte des classes
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Humour noir sévèrement grinçant dans cette fresque politico-sociale de la Bulgarie contemporaine, comparée à un cadavre, plus disposée à l'exil déjà bien amorcé qu'à une transplantation symbolique. Une noirceur très slave, dans un pays où même Dieu semble avoir rendu son tablier, vaguement inspirée par endroits de "Tristesse" (Tchekhov): transparait au travers du vieux chauffeur dont le fils est décédé pour avoir reçu des soins trop tardivement et ne trouvant d'écoute attentive pour s'épancher qu'auprès d'un chien errant affamé (le cheval du cocher Iona dans la nouvelle), ou les trois jeunes imbibés plein d'arrogance et d'égoïsme.
La structure du film est magnifiquement architecturée, se clôturant quasiment de manière circulaire (fille à l'école), plus complexe et moins répétitive que chez Jafar Panahi, en opérant des connections discrètes entre les sketches indépendants qui se succèdent . Des protagonistes des segments précédents apparaissent ainsi subrepticement, à titre figuratif, au détour très fugitif d'un trottoir (principe retrouvé dans "Les rebelles du dieu néon" de Tsai Ming-liang); de même des personnages réapparaissent ultérieurement, occasion de découvrir une autre facette de leur personnalité (la conductrice, tantôt aimable puis vengeresse). Sans compter le lien unissant chirurgien-transplanté-donneur cardiaque ayant tous occupé le siège du chauffeur ou la banquette arrière d'un des taxis.
Autre qualité à mentionner, la violence ne s'abandonne pas à la surenchère graphique. La vraie violence est ailleurs, sociale, morale. Le meurtre est laissé hors champ, la lutte au sol se terminant par un coup de pavé quasi-définitif n'entre pas dans les détails et s'oriente plutôt vers la parodie ("Je vous est frappé sans faire exprès !"), le harceleur n'est pas transformé en passoire, on l'abandonne humilié, comme un misérable singe, dans son jus.
7,5/10
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Créée
le 28 déc. 2023
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