La carpe et le lapin

Philippe de Broca signe une comédie policière rafraîchissante, fleuron du cinéma populaire français des années 70, portée par la bondissante Annie Girardot et le flegmatique Philippe Noiret.

Ce tandem improbable de héros d'âge mûr, composé d'un professeur d'université bon vivant et libertaire, et d'une commissaire de police divorcée, n'assumant pas trop son job face à cet éternel vieux garçon qui ne porte pas les flics en haute estime, donne lieu à de savoureux échanges dialogués par Michel Audiard, plus sobre qu'à son habitude mais pas moins inspiré.

Cet arrière-plan sentimental se double d'un véritable récit policier, certes léger mais bien ficelé, pour un mélange singulier à l'équilibre fragile, qui pourra sans doute déconcerter.
A titre personnel, j'ai été plutôt charmé par cet alliage d'enquête et de séduction, grâce notamment à un rythme trépidant et à une partition tout à fait adaptée de Georges Delerue - alternant les airs entraînants avec quelques passages délicieusement angoissants.

Si "Tendre poulet" fonctionne si bien, c'est notamment grâce à une distribution sans faille. Outre l'abattage d'une Annie Girardot qui paraît rajeunie, il faut souligner la présence de seconds rôles convaincants : Catherine Alric parfaite dans son rôle habituel de ravissante idiote, Hubert Deschamps lunaire et inquiétant, Guy Marchand misogyne et crétin...

Enfin, le charme de ce petit film attachant repose sur son décor urbain : Paname à la fin des années 70, ses monuments et ses bâtiments grisâtres, ses enseignes désuètes, ses artères encombrées de R12 et de 404, ses petits matins à la lumière crue, font partie intégrante de la nostalgie diffusée par "Tendre poulet" - un peu à la manière des "Ripoux" quelques années plus tard.