Du sang, du labeur et des lames

Dario Argento offre dans Ténèbres du sang, du laborieux et des lames (de rasoirs, de couteaux ou de haches). Psychologie du tueur, vraisemblance, enquête, humour, esthétique ou recherche formelle sont en rupture de stocks, que voulez-vous, c'était la crise des années de plomb en Italie, il n'y a plus que les meurtres qui étaient gratuits dans les rues.

Première constatation : la majeure partie du film se déroule en plein jour ou dans des pièces éclairées. Dario Argento avait demandé à son directeur de la photographie d'utiliser pour le tournage une lumière aussi intense que possible afin de s'approcher au maximum de « l'éclairage réaliste » présent dans les téléfilms. Alors là, désolé Dario mais je fais partie de ceux qui se fient en premier au titre d'un film et à son affiche avant de faire leur choix et pour moi appeler un film Ténèbres alors que l'on veut copier  l'esthétique moche des téléfilms américains se déroulant dans des demeures de luxe et débités à la chaîne pour les après-midis de TF1, c'est de la tromperie sur la marchandise. Le Ténèbres du titre n'est que le titre du bouquin dont on aperçoit quelques pages dans la bouche d'une des victimes. J'ai donc été déçu d'autant que, classé troisième au top des films du réalisateur, je pensais voir de la beauté des images baroques et du fantastique alors que c'est un pur giallo, un slasher italien avec accumulation de meurtres par objets tranchants et pénétrants toutes les dix minutes. Autre déception je voulais visiter Rome mais par un choix délibéré de sa part, Argento n'a pas voulu filmer la Rome touristique, seule apparaît brièvement une place où une victime assise sur un banc se fait assassiner en plein jour.

Le scénario truffé d'incohérences, une marque de fabrique chez Argento, n'est qu'un prétexte pour amener les situations de meurtres. Les acteurs John Saxon, Anthony Franciosa, Giuliano Gemma, Daria Nicolodi sont mal dirigés, ils sont négligés puisque le but du jeu c'est de montrer des jolies filles peu vêtues. Certaines sont remarquables comme Eva Robins, actrice transgenre avant que ça ne devienne à la mode ou Veronica Lario, probablement l'une des actrices les plus célèbres en Italie et l'une des mieux payées avec trois millions d'euros de pension alimentaire mensuelle suite à son divorce avec Silvio Berlusconi.

J'ai cependant apprécié les fausses pistes qui ne m'ont fait trouver le coupable que peu avant la fin grâce à l'aide de la citation de Conan Doyle dans le Chien des Baskerville.

Quand vous avez éliminé l'impossible, tout ce qui reste, même si c'est improbable, c'est la vérité.

Effectivement, tous les coupables potentiels ayant été un à un éliminés, il n'en restait plus qu'un, même si c'était le plus improbable.

Un film dispensable en résumé, qui, à force de vouloir ressembler à un téléfilm, se distingue peu d'un téléfilm de base.