Nolan continue ce qu'il avait déjà commencé avec Dunkerque, à savoir la radicalisation de son cinéma.
Pourtant, si dans Dunkerque, il avait su épurer son scénario pour ne garder que ce qui l’obsède, ici, et paradoxalement, il l'alourdit de scènes d'explication à n'en plus finir.
Le cinéma, c'est l'émotion, je vais au cinéma pour ressentir, pas pour essayer de comprendre qui fait quoi et comment il le fait, si je veux utiliser mon cerveau, j'ouvre un livre de philo ou de physique.
En fait, on s'en tape des explications, c'est une perte de temps. Dans Inception, ils passent leur temps à expliquer le concept du rêve sauf que, quand tu le regardes une deuxième fois, bah tu te fais chier vu qu'on t'explique un truc que t'as déjà compris...
Là c'est pareil...Mais, encore pire que dans Inception, tout ce qui fait une histoire, à savoir les personnages, leur développement, la narration, semble, dans Tenet, complètement annihilée par un seul concept, une seule idée : l'inversion temporelle.
Tout est rendu in abstracto, Nolan joue avec son concept et tout le reste est au service de ce concept-roi qui enlève toute humanité aux personnages, au point que le héros n'a même pas de prénom et que le méchant est un nihiliste. Les personnages en sont réduits à leur physique, ce sont de simples corps qui se déplacent
Tout est mécanique, systématique chez Nolan, c'est une monde de rouage. Tout a un sens, une cause, un effet. C'est un monde clos et rationnel et là est tout le problème : comme tout art, le cinéma doit laisser place à la subjectivité du spectateur/lecteur, ce n'est pas quelque chose d'objectif, l'art n'est pas une science et chez Nolan, c'est tout le contraire : son cinéma est purement rationnel, logique. Le personnage de Clémence Poésy dit à un moment du film " n'essaie pas de comprendre, ressens". On a l'impression que cette phrase est aussi adressée au spectateur, mais alors pourquoi nous saouler avec des scènes d'explications où il n'y a rien à ressentir et tout à comprendre ? Ce qui faisait cohérence dans Dunkerque (car il n'y avait de toute façon presque pas de dialogues) fait ici paradoxe dans Tenet.
Et j'en viens aussi à ce qui m'a le plus déçu : les scènes d'action.
Nolan a beaucoup été critiqué pour ces scènes d'action jugées plates ou molles, ce dont je ne suis pas d'accord. L'intérêt des scènes d'actions de Nolan ne réside pas dans leur mise en scène à proprement parler mais dans le fait qu'elles servent la narration (dans les Batman) où expriment une thématique, souvent la temporalité (Interstellar, Inception, Tenet), elles ne sont pas gratuites.
D'où l'intérêt pour son cinéma d'utiliser la caméra Imax utile pour les plans larges et qui permet de mettre en valeur des idées de scènes d'actions.
Mais je trouve que dans Tenet, Nolan n'exploite pas assez son idée de temps inversé pour ses scènes d'actions, on a juste une scène de course poursuite sur une autoroute et une bataille finale assez banales toutes les deux. L'inversion temporelle est souvent réduite à quelque effets sympathique d'arrière plan.
Nolan fait du Nolan donc, c'est froid, compliqué, innovant mais comme beaucoup de ses films, assez futile.