Terminator est une saga fascinante. Pas tant pour son apport dans le cinéma de science-fiction mais également pour sa place bien particulière au sein des franchises. Depuis la sortie du deuxième volet et le départ de James Cameron, on a assisté à une valse des propositions qui traduisaient distinctement le trouble quant à sa meilleure destination. En 2003, le réalisateur Jonathan Mostow se risquait avec Terminator 3 à recopier son prédécesseur sans grand succès. Puis 6 ans après, ce fut au tour de McG avec Renaissance de proposer une direction futuriste plus attrayante mais néanmoins rendue précaire faute d'un scénario abouti. Arrive maintenant Terminator Genisys qui lui décide de faire table rase, et repartir du point d'origine. Un reboot aux allures de retcon (réécrivant la mythologie).
Après tout, pourquoi pas? Eh bien pour plusieurs raisons que le film va s'empresser de mettre en lumière. Premièrement, retrouver la ligne principale (1984, Sarah Connor, Kyle Reese, le T-800), c'est prendre le risque de ne jouer que sur la nostalgie et se refuser à ajouter des choses à la mythologie. Genisys pourrait se contenter de se heurter à ce mur, mais il fait pire. Il fonce droit dessus et embarque toutes les figures de la saga avec lui.
Le film vous promettait de repartir sur de nouvelles bases ? L'illusion sera de courte durée, puisque son histoire va encore répéter le schéma tracé par les deux premiers Terminator. Ce qui est déjà problématique. Maintenant, imaginez que le film va complètement déboulonner leurs mécanismes et dénaturer leurs thématiques, et vous aurez une idée de ce qui vous attend. Vous trouviez que Terminator 1 & 2 contenaient leur petites incohérences par-ci par là? Attendez vous à une averse d'absurdités suivie d'une tornade de facilités. Deuxièmement, opter pour une réécriture peut également se révéler néfaste pour les personnages déjà familiers. Une autre erreur commise ici et elle va prendre des proportions hallucinantes
Hier, le T-800 était ce bloc de charisme, ciment d'une histoire mêlant adroitement crainte technologique et espoir d'une symbiose entre l'homme et la machine. Dans Genisys, il en est réduit à jouer les comiques troupiers dans une histoire sans queue ni tête démolissant son aura et la fable S.F qu'il charriait. Arnold Schwarzenegger le campe avec une absence de conviction embarrassante (mais que pouvait-il faire d'autre?). Ça ne s'arrête pas à lui, puisque le pire c'est apparemment un travail d'équipe. L'iconique Sarah Connor en prend aussi pour son grade. Défraîchi au point d'être un amalgame d'adolescente tête à claques et de jeune femme en pleine montée d'hormones, le personnage consterne par son manque flagrant de charisme et de sensibilité. Emilia Clarke joue la partition, mais difficile d'éviter la fausse note puisque le morceau est si dissonant.
Enfin - et pas des moindres - Kyle Reese. Sûrement l'élément qui me reste le plus en travers de la gorge, tant son traitement évoque la profanation scandaleuse. Michael Biehn en avait fait une pure figure héroïque, immortalisant l'image d'un résistant vif, habile et incroyablement tragique. Il est aujourd'hui rabaissé à celle d'un bidasse bêta et inexpressif, que le script envoie à la lessiveuse sans ménagement. Je pourrais le reprocher à Jai Courtney (et c'est vrai qu'il n'aide pas), mais l'injure incombe principalement à ce script ignoble.
Pour parachever le tout, sachez que les diverses scènes entre Sarah Connor et Kyle Reese - dont l'alchimie est proche de zéro - atteignent un niveau d'inepties désolant. Alan Taylor - comme ses comédiens - compose avec le peu qu'il a en guise de fil conducteur. Sans grande surprise, il fait preuve d'un manque d'inspiration criant. Pas une seule scène spectaculaire à retenir, ni même un semblant d'idée en termes de scénographie ou de découpage. À la rigueur, les fans pourront apprécier les dix premières minutes qui bouclent la boucle avec le premier opus. Au delà de ça, les 2 heures qui suivent sont d'une indigence rarissime. Histoire d'extirper un peu de positif, je saluerai la prestation impeccable de Jason Clarke et la petite apparition de J.K Simmons (grand acteur à qui l'on confie à peine plus qu'un caméo). Je terminerai par une citation du T-800 de Genisys, "Vieux mais pas obsolète". Une réplique qui a tout de la mauvaise blague, quand on voit l'ardeur déployée pour ringardiser la franchise dans ses fondamentaux.