Récompensé dans de nombreux festivals, "Tesis" est le premier long-métrage du cinéaste Alejandro Amenabar, alors âgé de seulement 23 ans, et qui connaîtra la renommée avec "Ouvre les yeux" et "Les autres".
Sujet délicat et sacrément couillu pour un premier film mais visiblement, cela n'a pas effrayé une seconde le jeune Amenabar. Le cinéaste en herbe s'intéresse effectivement à notre instinct voyeuriste, à notre goût du sang, du macabre, mais surtout à notre rapport aux images, retranscrivant à merveille cette poussée d'adrénaline face à un spectacle éprouvant mais ô combien fascinant.
Amenabar a également la bonne idée de placer son récit au coeur d'une fac entièrement dédiée à l'audiovisuel, esquissant du même coup une réflexion passionnante sur le cinéma, sur sa nature de spectacle et sur ce qu'il est censé offrir à son audience. Doit-on donner aux spectateurs ce qu'ils demandent, même si cela est moralement indécent, ou au contraire, imposer sa vision du monde ? Peut-on encore concilier art et industrie quand une économie est au plus bas ? Des questions pertinentes auxquelles le cinéaste se garde bien de répondre.
Rappelant dans ses meilleurs moments le De Palma de "Blow out", "Tesis" tien en haleine jusqu'au bout grâce à la mise en scène efficace d'Amenabar, jouant admirablement avec la suggestion, distillant une angoisse palpable tout du long et ménageant durablement son suspense malgré quelques facilités d'écriture et des séquences d'action magistralement foirées.
Bien qu'ayant vieilli et souffrant d'une patine visuelle assez pauvre, "Tesis" est une plongée ambigüe et inconfortable au coeur même de nos plus bas instinct, une première oeuvre prometteuse sur la puissance des images et sur les répercussions insidieuses qu'elles exercent sur nous et dans notre société.