O.F.N.I.
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le 9 avr. 2013
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Michel Foucault nous invite à distinguer l'utopie dans laquelle l'âme se réfugie pour fuir le corps, cette topie impitoyable, de l'utopie faite corps, à travers lequel elle s'exprime et qu'elle traverse de désirs et de peurs. L'habit de mode, ecclésiastique ou des magistrats est une forme du corps utopique dans la mesure où le corps s'y prolonge dans un interstice qu'il a imaginé. Pareillement, le tatouage, le piercing, la scarification, la stigmatisation, le martyr sont d'autres formes utopiques que le corps incarne. A chaque fois, le corps se transforme selon ses désirs et ses peurs. Dans ce film si fascinant, qui nous attire comme il nous repousse, nous sommes invités à observer ces transformations utopiques et dystopiques, ces corps traversés de désirs et de peines.
On observe donc une série de métamorphoses continue, d'utopies à chaque fois reconduites, échouées, recommencées. D'autres fois, le personnage est contaminé par le changement, au contact d'une maladie, d'un parasite mécanique et industriel. Rien n'y fait, une fois commencée, l'aliénation s'avérera incessante, la corruption inexorable. Ainsi, à force de transformations, entre l'organique et l'inorganique, que ce soit dans un montage tantôt rythmique en stop motion, tantôt mosaïque en plus longs plans, ou dans un corps tantôt identique et humain, tantôt autre et machinique, le film creuse un écart dans lequel nous sommes aspirés. Cet entre-deux auquel le spectateur est soumis dans cette expérience cinématographique n'est autre que le "milieu", le lieu ou l'élément, de la fascination. Sans arrêt, nous sommes pris entre une image formatrice et une image déformée, un corps rassurant et une transformation inquiétante, pour finir par être voués à un désastre, une fascination béate et sans retour.
Il arrive même que devant cette monstruosité progressive, ce processus de différenciation par ressemblances successives, à chaque fois plus éloignées de l'original, nous soyons touchés par une certaine pitié. Ce sentiment, beaucoup plus présent dans des films comme Elephant Man ou Eraserhead de Lynch, auxquels Tetsuo peut s'apparenter, se manifeste dans l'attachement amoureux et destructeur qui se perpétue entre les deux amants jusque dans l'aliénation la plus complète.
En définitive, au-delà d'une simple critique ou louange de la mécanisation et de la numérisation effrénées du monde, et bien plus que le message nihiliste final, ce film nous donne à sentir les forces ambivalentes du corps humain et de l'imagination combinés.
Créée
le 18 mai 2023
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