Beaucoup moins réputé que l'inoubliable « Dernière séance », « Texasville » m'a pourtant fait l'effet d'une petite bombe, d'autant que je n'en attendais pas grand-chose. On a en effet rarement l'occasion de voir un réalisateur se lâcher autant sur ses héros : soit vulgaires, soit alcooliques, soit stupides, voire les trois en même temps, Peter Bogdanovich n'hésite pas à en mettre plein la gueule aux texans, et pourtant... Se dégage du récit une douce mélancolie, comme si, malgré l'image peu flatteuse que le réalisateur dresse des habitants, il y avait quelque chose d'extrêmement sincère derrière chacun, finalement plus là parce qu'ils ne peuvent faire autrement que parce qu'ils sont réellement méchants. Ils se ressemblent d'ailleurs tous un peu : hommes amateurs de conquêtes, femmes ridiculement romantiques... Difficile de trouver quelqu'un pour sérieusement relever le niveau. Pourtant on finit par s'attacher à cette bande de bras cassés, peut-être justement parce qu'ils sont authentiques et ne se font pas d'illusions sur ce qu'ils sont, à l'image d'un héros complètement débonnaire. Parlons-en d'ailleurs de ces retrouvailles entre ce dernier et Jacy Farrow, sa fiancée du premier film : il faut les voir se rencontrer vingt ans plus tard, très loin du côté glamour que l'on pouvait imaginer. Mais là encore c'est cela qui rend le film si particulier, parce qu'il ne va jamais là où on l'attend, parce que les relations entre les différents personnages sont loin d'être celles auxquelles on assiste habituellement, et parce que cet amour de jeunesse retrouvée n'a rien de conventionnel, s'avérant au contraire plus vachard qu'autre chose, la personnalité de Jacy, jouée par une Cybill Sheperd irrésistible, y étant aussi pour beaucoup. Bref, c'est une œuvre étonnante, à la fois méchante, nostalgique et émouvante : les suites de grande qualité sont rares, « Texasville » en fait assurément partie.