Le monde de la video de snow est un petit milieu, un rituel annuel en automne avec ses codes, ses usages et surtout son noyau de fans. Les rares tentatives de faire du film de snowboard qui sorte de ce cocon s'est présenté sous la forme de fiction ou de documentaires, qui ont été plus ou moins toutes ratées. Travis Rice tente ici de faire une vraie vidéo de snow «classique» mais qui toucherait un plus large public, et pour ça il a les dollars qui vont bien. Deux ans et beaucoup de pub plus tard, le constat est un peu amer...
Côté snowboard, ça commence sur les chapeaux de roues avec une séquence en Alaska absolument dingue, dans ce style de freeride revisité avec des tricks de freestyle que j'aime tant. Back 7 dans 50 de pente, butter sur des petites arrêtes ultra raide, des kickers en entrée de couloir pour commencer la ligne avec un gros cab 5e tc. Travis Rice est exceptionnel, et l'est d'ailleurs tout le long de la video, aussi bien en freeride avec des lignes super tendus (dont certaines en switch !), mais aussi en freestyle\backcountry avec à peu près toutes les variations de double cork possible et imaginables. Il est clairement le rider le plus polyvalent du monde, et l'un des plus créatifs. Dans ce même style de mélange freeride\freestyle la part de Nicolas Muller est tout simplement géniale (ce n'est pas étonnant). Après ... ça se gâte un peu, les autres riders sont bien dans leur registre, mais rien de surprenant de leur part, MacMorris nous sort sont triple cork, JJ se met une ou deux grosses lignes. Solide, classique, maitrisé.
Il y a aussi du bien moins bon, avec des riders qui font de la présence, et puis des sessions d'un intérêt bien moindre. On nous avait promis monts et merveilles de lignes extrêmes au Chili, ça finit par un truc tout sketchy dans le Darwin ... mouais. La session de backcountry à Jackson est en demi teinte malgré la grosse variation de tricks. Et une session de park pas du tout à la hauteur des super prods actuelles. On se demande bien pourquoi on passe autant de temps à filmer un pauvre handplant ou un bs 3 au super ralenti ...
Et du ralentit vous allez en manger, car qui dit gros moyen dit grosse caméra, et qui dit grand public dit effet bling bling. Du coup on se retrouve avec de la super loupe sur tous les tricks, mais aussi sur tous les plan de nature trèèèèès esthétisant, et vas-y que je te filme les ours et les glaciers et les montagnes et les petits zoziaux ... vu, revu et lourdingue, il y a d'autres choses à faire. Et entre tout ça ? le film avait l'intention de faire un peu plus que du snowboard tout en restant fidèle au genre. Du coup on a une session jackass "je massacre l'Alaska lol", une session "oh mon dieu, n'y va pas c'est trop dangereux" "Si bébé, j'y vais quand même, peu m'importe de mourir sur mon terrible engin" et enfin le "tu dois respecter la montagne pour rester en vie" (ou sinon tu peux aussi éviter de couper les lignes de plaque avec un gros slash, mais ça fera pas de belle images d'avalanches). Et puis surtout des images de matos à n'en plus finir, des mecs qui font du sled (au ralentit) pendant des plombes, des séances de congratulation, de dépose, de mecs qui chaussent et qui prennent de l'élan (tout au ralenti), qui doivent bien tenir à elles seules un tiers de la vidéo. Bref tout ce que l'on a vu dans les prods moyennes des dernières années, qui avait un peu disparu, et qui revient en pire avec un petite touche mi-hollywood, mi-NatGeo et un relent de kids pleins aux as qui montrent leur grosses machines à tout le monde ... miam.
Au final, il y a du très bon snowboard, mais pas que, c'est inégal. Par contre côté cinématographique on repassera, on a peu près tout ce que l'on imaginer de mecs bourré de matos qui testent un peu tout «parce que ça en met plein les mirettes». On se retrouve avec une vidéo très prévisible, qui révolutionne rien du tout, et un poil chiante ...
Pour des choses mon prétentieuses et plus innovantes et on ira plutôt voir du côté des crémeries habituelles (People, Absinthe) et surtout de la vid de Xav Delerue.