Implacable, mais pas infaillible

Esthétiquement, il s'agit probablement d'un des meilleurs Batman avec ceux de Burton. La photographie sombre, Gotham sous la pluie, les variantes blanc/noir/rouge, le montage sec... La BO... Une excellente BO qui nous démontre toujours combien un thème puissant et des variations dans les tons mineurs nous dynamisent une intrigue et instillent un sentiment de chaos rampant propice à une séance satisfaisante. Tout dans la forme valide un feu vert brillant. Maintenant, parlons du fond.

Ce nouveau Batman, intelligemment pensé comme un film indépendant, s'appuie sur plusieurs idées pas nouvelles, mais qui ont fait leurs preuves. Le personnage est jeune, et par conséquent pas encore rodé au niveau de sa philosophie. Également, ses origines sont perverties pour donner du corps à un dilemme moral. Cela, on l'avait déjà vu dans mon cas dans la série des jeux vidéos Batman, Telltales. Mais ici, ça part en cou*lle. Car alors que s'amorçait, d'une façon logique et bien amenée, le dilemme moral de Bruce Wayne et de son héritage familial, Alfred (survivant à une explosion à 1 mètre sans protections) se met à vider son sac et à annuler ce qu'une heure trente de scénario vient de mettre en place. Quel gâchis. Non seulement cette séquence annihile les variations de l'histoire par rapport aux origines archi-connues de Batman et détruit donc une relecture originale (qui apportait au film une nette plus-value), mais en plus, cela sabote la légitimé du méchant Homme Mystère. Ce bougre avait en effet sa place dans Gotham car réagissant à une imposture qu'il s'échinait à mettre en scène, et pour avoir un bon méchant, il faut un méchant qui a une excellente raison d'être méchant (aka Seven). C'était le cas... jusqu'à ce qu'on apprenne qu'il avait tout faux. Un des mecs les plus intelligents de Gotham qui se plante aussi grossièrement... Et donc, si le film désavoue la cause de son méchant, c'est plus un bon méchant, juste un gros con qui s'est planté et s'amuse à refaire Seven à sa sauce mais sans légitimité. Dommage.

Deux autres points de détail problématiques : Les explosifs, c'est de la merde (Une bombe explose dans les mains de Batman et il s'en sort sans une égratignure, Alfred également, mais lui avec 3 égratignures), et le sauvetage d'un Batman en joue à bout portant. Certes, le cinéma américain nous a habitué à ce cliché, mais c'est quand même agaçant de devoir l'encaisser en plein final. Sinon, c'est globalement bien mené. Bonne interprétation de Catwoman (à un dialogue anti patriarcal près), bonne version du Pinguoin (méconnaissable Colin Farell), et une intrigue copiant les temps forts de Seven qui a le bon goût d'être satisfaisante en cultivant une esthétique sombre tout à fait appropriée. La bonne nouvelle, c'est que je pourrai corriger quelques unes de ces erreurs dans un fan cut du film dès que celui ci sera disponible. On espère maintenant que ce sera dans peu de temps.