Quel plaisir durant les premières minutes de retrouver la patte de Harmony Korine, dans un style évoquant son "Spring Breakers" réalisé 5 ans auparavant, œuvre au propos percutant et à l'esthétique éblouissante, qui fait partie de mes films cultes.
On retrouve un personnage central à la fois perché et charismatique, campé par un Matthew McConaughey arborant une longue chevelure blonde filasse, qui pourra rappeler le fameux Alien du film précédent. Ce héros épicurien nommé Moondog, défoncé en permanence, mène une existence paisible dans les Keys, archipel préservé au large de la Floride.
Un peu voyou, mais surtout poète génial à ses heures perdues, Moondog est rappelé sur le continent suite au mariage de sa fille unique. On découvre alors son épouse Minnie Boo (Isla Fisher), son grand copain rappeur Lingerie (Snoop Dogg), ainsi que son agent littéraire (Jonah Hill).
Ce microcosme composé de marginaux hauts en couleurs se révèle bien sympathique, mais Harmony Korine a du mal à enclencher la seconde, de sorte qu'on finit par se lasser des grands éclats de rire un peu teu-bé de Moondog, de son éternel goût pour l'alcool et la dope, et de son obsession pour le sexe.
"The Beach Bum" (soit le vaurien de la plage) comporte un aspect régressif qui finit par apparaître gratuit à force d'être constamment mis en avant. OK, l'apologie de la liberté et de la jouissance fait plaisir à voir, mais on aurait aimé d'autres pistes de réflexion...
Et ce ne sont pas les quelques péripéties - plus ou moins drôles et savoureuses - avec divers personnages secondaires (Zac Efron, Martin Lawrence,...) qui apportent une véritable épaisseur au récit.
Heureusement, Harmony Korine n'a pas son pareil pour esquisser des ambiances colorées et mélancoliques, à base de lumières somptueuses (couchers de soleil dans les tons pastels, petits matins au ciel clair, boîtes de nuit éclairées au néon) et de musiques variées, composant une bande originale superbe de douceur.
Sa science du montage contribue également à rendre la mise en scène percutante.
Loin de la sécheresse formelle et de la trashitude de ses débuts, Harmony Korine creuse donc le sillon entamé dans "Spring Breakers", avec une tonalité plus légère, plus apaisée - mais sans atteindre la réussite de ce dernier, hélas.
"The Beach Bum" reste une comédie sympathique, mais s'avère plus inégal et plus redondant, au point que la glorification de son héros hédoniste finit par tourner un peu à vide.