Ils ont uriné sur le tapis du mauvais type

A l’ouest de l’ouest vivait un type, un type dont je vais vous conter l’histoire, un type qui s’appelait Jeff Lebowski mais qui préférait se faire appeler : Le Duc. Si vous n'avez que faire de la politique, si vous aimez vous la couler douce en écoutant une musique relaxante dans votre bain, si pour vous, les copains c'est sacré, que les règles du bowling c'est AUSSI sacré, si vous aimez les verres de russe blanc et le burlesque, suivez le guide et les frères Coen, voici The Big Lebowski.


Aucun furet n’a été maltraité pendant le tournage


Un chef d’œuvre iconique signé par les frères Coen


Pourquoi est-ce que tellement monde a aimé The Big Lebowski ? Pour quelles raisons on aime tant ces personnages dégénérés et cette histoire si stupide ? Son humour burlesque, ses rencontres farfelues les unes des autres, ses répliques et séquences cultissimes, sa mise en scène criante de génie, ses musiques texanes, The Big Lebowski est colossal malgré le fait qu’à sa sortie, les critiques furent mitigées.


Les crises de fou rire, maladresses et situations cocasses se multiplient, les bons moments se multiplient, les répliques sont faciles à retenir, les personnages sont géniaux, on prend un réel plaisir à suivre l’histoire de types banales embarqué dans une aventure les dépassant complètement à cause…d’un tapis. Pour cette comédie noire aux allures de thriller, les frères Coen continuent à nous offrir une œuvre au langage riche et juste. Les dialogues sont longs, mais, contrairement à du Tarantino, on se marre. Justement, tout comme la narration des films de Quentin Tarantino, les œuvres des Coen forcent le respect, tout comme le travail sur ses personnages.



"Ma quoi ? Ma femme, Bunny ? Est-ce que tu vois une bague à mon doigt
? Est-ce que cet appart ressemble à celui d'un mec marié ? Le siège
des chiottes est relevé, mec !"



The Big Lebowski et ses personnages indisposés à affronter une histoire de caïds


Joué par Jeff Bridges, le Duc, il a une façon merveilleuse de vivre sa vie. Robe de chambre, méduses aux pieds, lunettes de soleil, détaché de tout, il ne se soucis de rien, il vit au jour le jour, passe son temps à glander, fumer de l’herbe, boire un verre de Russe Blanc (mélange de Whisky et Lait) dont il est accro, se détendre dans son bain en écoutant une cassette de relaxation, faire du tai-chi sur son tapis, passer du temps avec ses potes Donny et Walter, et SURTOUT, jouer au Bowling. Dans The Big Lebowski, les copains, c’est sacré autant que le Bowling. Gare à celui qui ne respectera pas les règles, vous risquez d’avoir à faire à Walter.


Walter, c’est un gros type rustre, ancien du Vietnam qui, visiblement a gardé de sérieuses séquelles psychologiques. Flanqué du chien de son ex-femme passant son temps à aboyer, ne quittant jamais ses lunettes de soleil, son bermuda californien, et sa veste camouflée, Walter, a tendance à perdre très vite son sang froid. Très pointilleux sur les règles, notre vétéran qui ne travaille jamais le samedi pour cause de Shabbat, est un obsédé de la légalité, n’hésitant pas à remettre à sa place toute personne ne respectant pas les lois, quitte à les menacer avec une arme. Il veut toujours avoir le dernier mot, il bredouille comme un enfant, mentionne des évènements de la guerre du Vietnam dans pratiquement toutes les conversations.


Walter, c’est aussi un spécialiste des plans foireux. Tout l’oppose au Duc, et pourtant, les deux s’en accommodent, se respectent. Il a beau passer son temps à s’énerver contre son pote Donny, Walter tient à lui tendrement, et le protège. John Goodman, qui interprète le personnage de Walter, c’est en quelque sorte, l’un des piliers de notre film. Ses réactions, ses mimiques se passent de commentaires. On se tord de rire à chaque fois qu’on le voit à l’écran, persuadé qu’il va nous sortir une réplique savoureuse ou faire quelque chose de stupide. On se trompe rarement. Les dialogues et séquences hilarantes, on les doit à lui comme son célèbre « La ferme Donny ». Le meilleur rôle de John Goodman.


Puis on a donc Donny. Donny, on a été comme lui ou on a eu un ami de ce genre. Donny, c’est ce pote qui est là sans être là, transparent aux yeux de ces compagnons, tentant désespérément de se faire entendre mais jamais on ne l’entend, et quand on l’entend, on le casse parce qu’il n’est pas très futé et qu’il a un train de retard dans les conversations (parce qu’on a mit trois plombe à donner de l’intérêt à ce qu’il disait). Donny, le vrai stéréotype du souffre douleur qu’on arrive pour autant a adorer, à s’attacher, tant le jeu de Steve Buscemi, son interprète, frôle la perfection. Un personnage mystérieux dont on ne sait pas grand-chose sur lui puisqu’on ne le laisse jamais s’exprimer. Le boulet de la bande ? Et pourtant… .



LE MONDE EST EN TRAIN DE DEVENIR CINGLÉ ! Y A PERSONNE À PART MOI QUI
SE SOUCIE ENCORE DE RESPECTER LES RÈGLES ? METS-TOI ZÉRO ! [Le braque]
TU CROIS PEUT-ÊTRE QUE JE PLAISANTE ? [Charge son flingue] METS-TOI
ZÉRO !



The Big Lebowski, ce film aussi drôle qu’intelligent


Face à nos trois personnages, des tonnes de rôles secondaires mémorables :


• The Big Lebowski (David Huddleston), millionnaire paraplégique grognon, fier de sa réussite et méprisant le coté fainéant, limité, et passif du Duc,
• Maude (Julianne Moore), la fille de riche mi-bourgeoise, mi-bohème, provocatrice, souvent nue, passionnée par l’art « abstrait »,
• Jesus (JohnTurturro), mince, petite barbiche, filet à cheveux, ongle du petit doigt de la main gauche plus long que les autres et vernis de la même couleur que sa combinaison violette, cet hispanique au déhanché « parfait », futur adversaire de l'équipe de bowling du Duc, qui a passé six mois en prison pour exhibitionnisme devant un enfant de huit ans, parle de lui à la troisième personne, astique sa boule de bowling comme s’il astiquait ses coucougnettes, et lui file un coup de langue avant de la lancer,
• Les Nihilistes (Peter Stormare, Flea et Torsten Voges), un groupe de musiciens Allemands ne se séparant jamais de leur furet,
• Brandt (Philip Seymour Hoffman), l'assistant hypocrite mais fidèle de Big Lebowski, jouant l'intermédiaire entre lui et le Duc,
• Bunny Lebowski (Tara Reid), la seconde épouse de Big Lebowski qui a soit disant été enlevée. D'après les dires de Walter, elle c'est auto-kidnappée.
• Marty (Jack Kehler), le propriétaire bizarre de la maison que loue le Duc,
• L’étranger (interprété par le grand et moustachu à la voix grave de cowboy Sam Elliott), le narrateur de notre histoire qui apparaitra dans deux scènes de notre film.


Qu'il s'agisse du look ou des traits de caractère de ces protagonistes et même personnages secondaires, The Big Lebowski fait en sorte que, chacun est dans son monde, dans sa bulle malgré ses interactions avec tel ou tel personnage. Chacun à sa façon de voir, concevoir la vie. Les voir embarqué dans cette histoire complexe sera donc jubilatoire. Autre chose qu’on retient de ce film : la mise en scène.


Soignée, détaillée au millimètre près, vous en prendrez plein les mirettes alors que vous ne regardez pas un blockbuster américain mais un simple film indépendant. Le Duc étant souvent assommé ou sous l’effet hallucinatoire d’un de ses joints, les Coen nous livrent des séquences de rêve symboliques, parodiques, immersives (le passage où l’on est dans une boule de bowling), à la fois drôles, stupides, surréalistes, et intelligentes.


Quel film peut se vanter de réussir à être stupide en surface, mais intelligent si on explore l’intérieur ? C’est ça la magie de The Big Lebowski, vous faire croire que les héros sont stupides, que l’histoire est stupide, pour mieux vous donner une bonne leçon en vous prouvant qu’il y a quelque chose de beaucoup plus intelligent qu’on ne le pensait. De sa salle de bowling au gilet du Duc, des bougies parfumées Zen à son tapis persan, accessoires, décors, vêtements, tout est devenu iconique.



Nous ne croyons à rien, Lebowski, à rien ! Et demain on reviendra te
couper ton zézette ! On reviendra couper zézette !



Au final, The Big Lebowski, de par sa narration, ses personnages charismatiques, son humour, ses musiques, ses répliques, son visuel et sa mise en scène, mérite son statut de comédie culte, voir plus, mérite d'obtenir le statut de chef d'œuvre. Si vous voulez vous marrer un bon coup et ressortir des répliques à votre entourage après la projection, c'est ce film qu'il vous faut voir.

Jay77
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le 12 avr. 2018

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Jay77

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