Sur papier comme en bandes-annonces, The Birth of a Nation ne paraissait ni plus ni moins qu'un énième biopic ayant pour toile de fond l'esclavage. Sujet exploité jusqu'à la moelle avec 12 years a slave, The Butler et autres Django Unchained, qu'on croyait resté en 2012 et qui ne nous avait pas vraiment manqué (il faut dire que les films en question étaient au mieux moyen, au pire dispensables).


Malgré quelques minutes introductives qui nous rappelleraient les clichés de mise en scène hollywoodienne des (mauvais) exemples cités plus hauts, The Birth of a Nation ne tarde pas à dévoiler son véritable et fort plaisant potentiel.


Premier constat : l'acteur principal Nate Parker, également réalisateur, est brillantissime. Il ne joue pas le personnage de Nathaniel Turner, il EST ce dernier : aussi controversé dans les grandes lignes de l'Histoire que charismatique sur grand écran, le prêcheur afro-américain aux discours inspirés (de prime abord pacifiques, puis de plus en plus enflammés) est un de ces héros auquel on ne peut que s'identifier ; le genre qu'on aimerait voir plus souvent au cinéma à côté des sempiternels super-héros irréprochables et autres têtes à claques prépubères, allez savoir pourquoi. Le reste du casting n'est pas en reste, entre un Armie Hammer en grande forme (cette barbe !), un Jackie Earle Ealey tout à fait odieux (prestation d'une trempe qu'on n'avait plus vu depuis Watchmen), ainsi qu'une flopée de "gueules" et de choix judicieux parfaits dans leur élément (le révérend pansu, cupide et hypocrite, pour ne citer que lui).


Puisqu'on en parle, Parker fait autant mouche derrière sa caméra que devant : cadrages parfaits, photo impeccable, lumière sublime, décors somptueux, montage nickel, scènes d'une violence et d'un esthétisme rares, qui feraient passer les films cités plus hauts pour des Bisounours et c'est peu de le dire ! Ajoutez à l'équation un Henry Jackman possédé par la grâce et vous obtiendrez un exemple-type de ce qui, en 2017, mérite sans rougir l'estampe avec mention "putain de bon film". On n'y croyait plus.


Parce qu'en plus, Parker ne se limite pas à raconter les souffrances et les mauvais traitements subis par la communauté Noire durant l'esclavage, non : bien au contraire, il s'attarde intelligemment sur l'état d'esprit de ses personnages, chose que ses congénères touchaient à peine du doigt. Franchement, était-ce tant demander que de nous faire nous attacher à Cecil Gaines, Solomon Northup ou Django AUTREMENT qu'en suscitant l'apitoiement du spectateur ? Nous sentions-nous à leur place, ou du moins suffisamment de leur côté, pour prendre leur parti lorsque la situation tournait à leur avantage ? Non Mesdames, non Messieurs. Tandis qu'ici, qu'il s'agisse de Nat, de sa femme, de sa mère, de sa grand-mère, de ses camarades ou de la moindre de ses ouailles, je me suis senti embarqué dans cette cause comme jamais ; moi, un Chrétien catholique qui aime pourtant à penser que Dieu n'est qu' "amour" (tout comme ce pauvre majordome qui n'a rien demandé à personne). Au passage, le film se prive de tout manichéisme nauséabond et radoteur, en montrant entre-autres que quand les esclaves souffraient, tout n'était pas rose pour leurs propriétaires (le jeune Samuel Turner qui sombre dans l'alcoolisme et la résignation pour oublier qu'il n'est pas à la hauteur de son père et que sa propre mère lui préfère un esclave, super sympa !).


Première grosse claque de l'année et excellente surprise, The Birth of a Nation compte parmi ces films où il ne faut pas se fier à la bande-annonce, mais dans le bon sens du terme.


Foncez-y si ce n'est déjà fait !

reastweent
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le 16 janv. 2017

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reastweent

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