Jacen - Trip in Asia

The Cloud in Her Room (2020) - 她房间里的云/ 101 min
Réalisatrice : ZHENG LU Xinyuan - 郑陆心源
Actrice principale : JIN Jing -
Mots-clefs : Chine - Noir et blanc- Ressenti.

Le pitch :
Muzi rentre à Hangzhou, sa ville natale, pour le nouvel an lunaire et y retrouve l'ancien appartement de ses parents. Un lieu hors du temps, témoin des restes d'une relation qui a évolué. Elle tente de trouver des repères dans cette ville si familière et pourtant si éloignée de ses souvenirs.

Premières impressions :
Je suis tombé amoureux. C'est arrivé, comme ça. Puissamment. Sans trop prévenir. Je m'étais assis dans la salle de cinéma, convaincu de venir voir un film chinois d'auteur qui viendrait enorgueillir ma mémoire et me permettrait de toucher du doigt une réalité éloignée puis je suis tombé amoureux.

Sur l'écran en noir et blanc, une jeune femme au visage indéchiffrable se muait au travers une ville en constante reconstruction. La fille rencontre quelques amis, elle erre dans un appartement abandonné, dîne avec ses parents, marche sur la route, fait l'amour, discute de sentiments avec sa mère, conduit en rond sur un parking, fume une cigarette puis une autre, pleure, se donne un orgasme au réveil... Alors on la suit, elle, son visage, son corps, son sexe, sa respiration, ses sentiments, à travers les nuits et les jours de pluie. On la suit dans les immeubles en destruction, dans les bars et les karaokés, on la suit dans les carrières des montagnes alentours et dans la salle à manger. On la suit, même si on ne sait pas grand chose d'elle et qu'elle n'a pas l'air de savoir grand chose d'elle-même non plus, mis à part qu'elle est là, sans trop savoir où, mais elle est là.

Autour d'elle, le monde est empli de tunnels et de lumière sombre. De dédales labyrinthiques comme autant d’histoires potentielles oubliées. L'image prend parfois les couleurs du négatif, sans prévenir. L'amour de ses parents s'est étiolé, lentement mais sûrement. Son monde n'est pas très stable. Il y a des gens, ici et maintenant, des gens à qui elle parle de sentiments, des gens dont elle questionne le passé, des gens qu'elle regarde, qu'elle embrasse mais sans prolonger le futur dans un peut-être hideux. Et moi, je tombe amoureux.

Je tombe amoureux d'elle, de son actrice qui donne tout, mais surtout je tombe amoureux d'une forme de cinéma. Je tombe amoureux d'une réalisatrice qui a voulu faire ressentir par la force de l'image plutôt que de s'évertuer à raconter une histoire linéaire. Pour son premier long métrage, elle n'a transigé en rien sur sa sensibilité ni sur celles de ses spectateurs. Et j'aime ça, j'aime cet absolu. Je ne sais pas si j'ai compris le film et son histoire, mais je l'ai ressenti. Je l'ai ressenti si fort que j'ai été saisi par le besoin de me connecter à la sensibilité de sa réalisatrice. À peine sorti de la salle, je demandais son contact aux organisateurs du festival. Privilège de journaliste.

Alors voilà, en moins de dix minutes j'ai son numéro sur mon téléphone et je vais réaliser une interview. Tout ça a été fluide, comme évident. J'ai pris quelques notes sur mon programme, j'ai déjà réfléchi à mes premières questions, mais la première chose que je vais lui dire, c'est qu'aujourd'hui je suis tombé amoureux.