Justin Quayle,diplomate anglais de second rang, calme et discipliné,épouse Tessa,militante gaucho tiers-mondiste excitée.Le mariage de l'eau et du feu.Et lorsque Justin est nommé au Kenya,sa volcanique moitié va y trouver un terrain de jeu idéal,se lançant à corps perdu dans l'humanitaire,ce qui l'amènera à vouloir dénoncer les sinistres magouilles impliquant autorités locales,gouvernement britannique et un tout-puissant laboratoire pharmaceutique.Devenant gênante pour tous ces gens,elle finit assassinée et son mari,inconsolable,décide de prolonger son combat,bien qu'il n'aie pas partagé les engagements de sa femme.Il y a beaucoup de sujets dans cette adaptation d'un roman de John Le Carré.Une magnifique et atypique histoire d'amour tout d'abord,mais aussi une description terrible d'un continent africain moribond déchiré par la pauvreté,les guerres fratricides,les maladies,et victime en plus de la saloperie des rapports Nord-Sud qui permet à des multinationales sans éthique de se servir de la population pour expérimenter leurs produits avec l'appui de pays occidentaux aux abois et de politiciens et de policiers locaux corrompus.Un continent aux paysages paradisiaques devenu l'Enfer sur Terre pour ses habitants.Le film démonte avec précision la mécanique ayant mené à cette situation,car bien sûr tous ont leurs raisons d'agir comme ils le font.Les grands groupes internationaux,et pas seulement ceux de la pharmacie,obéissent à leur logique aveugle consistant à engranger toujours plus de profits,ce qui est la finalité du capitalisme qui régente le Monde actuel,et glissent allègrement dans une dérive mafieuse.Ce sont eux qui commandent désormais,les gouvernements occidentaux étant devenus leurs otages et leurs valets,ce qui est parfaitement résumé par ce diplomate british expliquant que la firme impliquée dans l'histoire a ouvert une unité de production au Pays de Galles,qu'elle aurait pu installer n'importe où ailleurs,et qui va permettre de réduire le taux de chômage dans une région sinistrée.L'Enfer est pavé de bonnes intentions et le capitalisme est apatride.Et comme les africains,qui s'entretuent volontiers et dont les élites se gavent des miettes occidentales aux dépens du peuple,contribuent eux aussi à leur propre malheur,le tableau n'est pas franchement réjouissant.Quant au combat de Tessa,il est juste mais voué à l'échec.Il parait étonnant qu'elle ne voie pas qu'elle est un pot de terre qui va inévitablement se fracasser contre le pot de fer,mais il est probable que,galvanisée par le bien-fondé de sa lutte,elle se fiche de mourir.Comportement finalement égoïste car elle entraînera dans sa chute son mari et ses proches.Certes,Justin parviendra à faire aboutir l'enquête de sa femme et quelques têtes tomberont mais au fond,le système ne changera pas pour autant,les têtes de l'Hydre capitaliste repoussant de plus belle.Alors tout ça en valait-il la peine?Fernando Meirelles retrouve l'énergie déployée dans "La Cité de Dieu" pour décrire avec réalisme et puissance la misère grouillante.Sa caméra toujours en mouvement donne au film un rythme de thriller et il utilise efficacement l'alternance entre plans larges majestueux et plans rapprochés au plus près des personnages.Le couple formé par l'agitée Rachel Weisz et le flegmatique Ralph Fiennes fonctionne admirablement,même si on comprend mal pourquoi Tessa est supposée avoir 24 ans alors que Rachel en avait 35 à l'époque et que ça se voit.Ils sont entourés d'acteurs de classe comme Bill Nighy,Pete Postlethwaite,Danny Huston et notre Hubert Koundé national.