Deux critiques, la première écrite peu de temps après la sortie du film et la seconde lors de son revisionnage en 2022 pour des ressentis relativement similaires!
Première critique (2012) (8/10) :
Quatre ans déjà... Oui, quatre ans que l'on attendait cette suite avec impatience tant « The Dark Knight » avait su nous conquérir au plus haut point. Bonne nouvelle : le résultat est à la hauteur des espérances, même s'il n'égale pas le niveau atteint par son prodigieux prédécesseur. Les réserves sont peu nombreuses, mais réelles : un léger fléchissement dans le dernier quart, quelques incohérences, raccourcis et symboles parfois lourdauds... Christopher Nolan retombe légèrement dans ses travers, empêchant le film d'être une réussite totale.
Nous n'en sommes pour autant pas très loin, et il serait honteusement hypocrite de dire que je n'ai pas pris mon pied devant cet impressionnant spectacle. Nolan démontre une fois encore sa maestria visuelle, offrant ainsi nombre de scènes somptueuses et intenses, d'autant que cette virtuosité se concrétise par de nombreuses idées brillantes. On pense bien sûr à ce puits de prisonniers, ou encore d'inscrire l'intrigue dans le contexte actuel. Car « The Dark Knight Rises » est aussi un film qui parle de notre époque et de la crise, d'autant que le réalisateur le fait avec beaucoup d'habileté.
En effet, l'intention première de Bane a beau être le chaos, on ne peut s'empêcher de trouver son propos parfois pertinent, s'apparentant presque à celui d'un Jean-Luc Mélenchon des grands soirs. Cet impressionnant méchant est d'ailleurs l'une des très belles surprises de l’œuvre : alors que certains craignaient la disparition du Joker, Tom Hardy prend remarquablement la suite d'Heath Ledger en offrant à ce mercenaire une force physique qui n'a d'égale que son intelligence et sa répartie.
Nouveauté toujours avec Anne Hathaway en Catwoman des temps modernes, superbement ambiguë et superbe tout court, s'intégrant parfaitement elle aussi à ce sombre univers. Le résultat est d'une ambition démesurée, collant parfaitement avec celle de Christopher Nolan depuis maintenant des années, une claque que peu de réalisateurs sont aujourd'hui capables de nous offrir. Oublions donc les rares imperfections du film pour admirer comme il se doit la conclusion d'une trilogie passionnante, assurément parmi ce que nous a offert de plus mémorable Hollywood ces dernières années.
Seconde critique (2022) (8/10) :
Cette fois, ça y est : Christopher Nolan passe la main, dont s'emparera malheureusement Zack Snyder pour une réussite artistique autrement moins importante (euphémisme). Restant bien dans la continuité du précédent quant au ton très sombre choisi, où Batman est encore plus mis à mal que précédemment, le réalisateur a toutefois l'intelligence de se renouveler, préférant se rapprocher à plusieurs égards de « Batman Begins ».
Sorte de « retour aux sources » permettant de comprendre les origines du Mal, ce dernier volet est toutefois encore plus apocalyptique dans son regard sur notre époque, monde en train de brûler à force d'avoir perdu tout repère, quitte à apparaître ambigu politiquement dans son discours : brillant tribun totalitaire aux accents mélenchonistes dans sa vision de la « lutte des classes », on peut se demander qui est le vrai danger pour Nolan, même si c'est aussi cette dualité qui donne à Bane sa force, sa complexité.
Plus « Bigger than life » que jamais, le film impressionne visuellement, notamment lorsque le réalisateur d' « Inception » transforme Gotham en lieu de non-droit avant de la faire basculer vers la guerre civile. Il y a toujours cette ambiguïté, cette dualité se trouvant dans de nombreux personnages, notamment celui de Selina Kyle/Catwoman, sans doute pas assez exploitée mais restant intéressant. Comme souvent chez Christopher Nolan, le scénario est un peu touffu, notamment dans les premières minutes où ces histoires de mafieux laissent dubitatif.
Mais comme toujours, il y a aussi de la grandeur, de la puisse à travers ce spectacle impressionnant, voulant sans doute en faire un peu trop sur le côté monumental, mais fait avec suffisamment de talent pour qu'on se laisse emporter par cette aventure concluant avec panache une saga qui n'en manquait pas. Le sentiment du devoir accompli.