Quand tu auras vu « The Dark Knight Rises » en VO, alors tu auras ma permission pour mourir !
En fait, je vais commencer par ça, car je pense que je consoliderai ma note de 8, lorsque j'aurais eu la chance de voir le film en version originale. Pourquoi ? Parce qu'on a l'impression que la voix française de Bane a été réalisée avec le mec qui lance les jingles sur NRJ. Du coup, dès l'impressionnante scène de prologue, j'ai lâché une grimace vomitive lorsque j'ai entendu le colosse lancer des menaces verbales à son opposant. Dommage, surtout quand le personnage en lui-même en impose grave à l'écran. C'est là que j'aimerai habiter dans une grande ville, pour pouvoir avoir le choix de la version...
Ok, pour ceux qui n'ont pas encore vu le film, arrêtez-vous là. Ce qui va suivre spoil à mort, donc évitez. Enfin, c'est vous qui voyez.
Voilà, hier soir je suis enfin allé voir ce « The Dark Knight Rises », un film que j'attendais impatiemment depuis le premier teaser qui date déjà d'un an (juillet 2011), et où l'on pouvait voir l'image ultime d'un Bane massif de dos, face à un Batman déstabilisé et essoufflé. Et un an de torture plus tard, l'attente prend fin, comme la trilogie « Nolanesque ».
« Voilà, c'est fait ». C'est le genre de phrase que tu lâches après ton passage au permis de conduire : l'attente est longue, tu as un peu de pression, d’excitation, puis finalement c'est passé vite, malgré une durée de 2h44...
Une œuvre intense donc, une œuvre épique, une œuvre d'un dernier volet de trilogie. Une œuvre qui vient mettre un point final à une aventure héroïque de haut vol, menée par une équipe artistique de qualité. Nolan aura vraiment réussi son coup, amenant une autre vision, une autre esthétique et autre univers dramaturgique à un genre multi-exploité, laissant échapper quelques grosses bouses commerciales. Nolan fait du commercial également (et à vrai dire plus que jamais dans ce dernier épisode), car super-héros = blockbuster. C'est comme ça. Mais c'est du commercial intelligent, réfléchi, avec une intention, un message. Pas une démonstration strictement « technico-numérique », pour nous faire savoir ce que l'on peut faire avec un budget de 220 000 000 dollars.
Alors, je vais commencer par une opposition devenue « classique » : TDKR est-il mieux que TDK ? La réponse est non. En fait, il est très différent. Sur pas mal de points.
Sur l'histoire, tout d'abord. TDKR reprend principalement l'intrigue de « Batman Begins », relativement au personnage de Bane, le mercenaire surpuissant de la Ligue des Ombres. Dès lors, l'idéologie de Ra's Al Ghul est retraitée, reformulée, via le plan machiavélique de l'homme au masque. De fait, le récit de TDK ne sert que de transition entre « Batman Begins » et TDKR (ce qui est dommage). On commence par la mort de Dent, son terrible mensonge emporté dans sa tombe, la situation d'exil de Wayne et de Batman, par la même occasion. Heureusement que Gordon est là, pour inciter le personnage de Blake à rappeler le Batman, huit ans plus tard, lorsque une nouvelle menace sévit. Donc, seul Gordon et Blake servent de lien avec le deuxième opus. Toutefois, l'univers de Ra's Al Ghul prend vite le dessus scénaristiquement parlant.
Sur l'ennemi, par la suite. Ok, le Joker est le méchant ultime, sacré, intouchable. Je ne vais pas dire le contraire. Mais soyons logique deux minutes. Le Joker et Bane n'ont strictement rien à voir. Bane a un plan, le Joker n'en a pas. Bane est un mercenaire fanatique, le Joker un chien enragé. Bane est un bourrin, le Joker un malin. Bref, Bane est définitivement le meilleur choix d'opposant pour ce dernier volet. C'est lui qui est le véritable provocateur, l'ultimatum, le barrage physique pour Batman. Le Joker n'était qu'une matière réflexive, une mauvaise herbe qui agaçait Batman, qui le faisait se remettre en cause. Mais au final, ils n'étaient rien l'un sans l'autre. Au contraire, Bane annonce la sentence dès le début du film : il va détruire Gotham et tuer Batman.
La tonalité, pour finir. TDKR a une tonalité épique. C'est le dernier volet, l'épreuve ultime pour le Chevalier Noir. Dès lors, cette ambiance à la fois lourde et envolée se fait ressentir tout au long du film. C'est pour cela que les 2h44 passent à une vitesse folle. TDK est plus posé, moins gourmand scénaristiquement parlant. C'est l'étape intermédiaire, celle où Batman est devenu un symbole, pour finalement devenir la « bête de foire ». Donc on pose les choses, on les explique, on les noircit à outrance. C'est ce qui faisait la force incomparable de TDK.
Voilà pourquoi TDKR est en dessous. Car c'est le dernier volet, celui où il faut en mettre plein la vue, avec un lot chargé de personnages, laissant place à de multiples rebondissements. Ça sonne plus hollywoodien donc, plus « commercial », alors que son aîné sonnait plutôt « expérimental » (pour un film de genre super-héros, ndlr).
En somme, on va dire que le processus de mutation dramaturgique est cohérent, sur un format de trilogie filmique. Il n'y a aucun doute. Mais toutefois, TDKR a ses défauts notables.
Dans son récit, premièrement. Les rebondissements de situation c'est bien, mais lorsqu'ils sont au détriment de la cohérence dramaturgique, c'est mal ! Des raccourcis qui ne concernent pas tout le scénario du film, fort heureusement. On pense plutôt au début de l'histoire, où après huit ans d'exil et d'enfermement psychologique, Wayne se motive assez rapidement pour se remettre en selle et prendre soudain un intérêt certains pour Gotham. Et ce malgré des avertissements sévères d'Alfred. On pense aussi à la fin du film, lorsque Bane active sa bombe terroriste et que l'on apprend la véritable identité de Miranda Tate, avec le contenu de ses motivations criminelles. Tous ça arrive comme un cheveu sur la soupe, à travers des ellipses temporelles un brin grossières.
La galerie de personnages, deuxièmement. Il y en a trop. De fait, on ne les exploite pas à fond. Une erreur classique, vue et revue. Par conséquent, Catwoman n'est pas assez exploitée, Miranda Tate n'est pas assez (voir pas du tout) traitée, Bane se fait gentiment mettre de côté à la fin du film, et des personnages comme Dagett, Foley, ou encore Stryver auraient pu rester à l’écart... Dommage.
Marion Cotillard, par la suite. Je ne suis pas un « hater » de la dame, loin de là. Mais quel foutage de gueule pour ce film ! L'actrice rend son personnage anecdotique et caricatural au possible, achevant sa performance médiocre par une simulation de mort des plus honteuses. Elle n'est même pas belle à l'écran. Donc Nolan, quand tu vois qu'une actrice est plus préoccupée à donner le biberon à son marmot entre deux prises, plutôt que d'assurer son job, tu l'as vire s'il te plaît ! Ça évitera de faire une tâche inutile sur ta création.
L'action, pour finir. Nolan nous a jamais habitué à des scènes de combats ou de cascades d'une demie heure, mais la scène de bataille finale est trop rapide, voire facile. Dommage pour un film qui avoisine les 3h ! Dès lors, un peu moins d'intrigues et un peu plus d'action aurait rendu le film encore plus épique.
Alors oui, une scène de bataille finale un peu bâclée, mais c'est pourtant deux scènes d'action qui m'ont le plus stupéfait dans TDKR.
On commence avec le prologue, très peu commenté dans les différentes critiques. Une scène aérienne, intense, oppressante, stressante et où l'on découvre directement un Bane imposant et sadique. Une scène qui nous rappelle le talent et l'inventivité de Nolan pour filmer la verticalité.
Deuxième scène, en réalité la scène clé du film : le duel entre Batman et Bane. Du grand cinéma ! Pas de musique, un décor sombre et métallique, des échanges d'uppercuts violentes, un Batman qui encaisse les coups, en même temps que le spectateur. Une scène froide, sadique, dramatique, tant l'on constate un Batman dépassé et dominé par un Bane massif, qui jouit de sa domination. Le cassage de dos, coup mythique du colosse, vient achever avec brio cette séquence de haut vol, sous les yeux impuissants d'une Catwoman effrayée !
D'autres points positifs.
Tom Hardy donc, qui campe un Bane imposant, effrayant et très fidèle à son univers de référence.
Anne Hathaway, magnifique en Selina Kyle. Chaque passage où l'actrice porte la combinaison de cuir est un boost à libido, ce qui prouve que le rôle de composition est réussi. Toutefois, comme évoqué plus haut, on regrette que le personnage ne soit pas assez exploité et qu'elle endosse trop souvent le costume d' « Huggy les bons tuyaux ».
Christian Bale, toujours impeccable et qui arrive à transformer chaque apparition du Bat en un moment unique (même si, c'est vrai, le héros un est brin absent à l'écran, relativement à la durée du film).
Les références aux comics, notamment à travers l'exposition du passé de la Ligue des Ombres. C'est peut-être le volet où Nolan reste le plus proche de l'univers originel, malgré des prises de liberté contemporaines encore plus marquées que d'habitude (écologie, lutte des classes, dictature, etc.).
Une ambiance chaotique bien exploitée. Un Gotham en révolte, avec son tribunal improvisé, ses sentences inhumaines, ses barricades urbaines, etc. Bref, on visualise un Gotham détruit, cloisonné, pris d'assaut. Cela m'a plu.
La stabilité de la mise en scène. Des cadrages droits, sans mouvements gerbants, sans effets de style « fun » et « cool ». Non, un classicisme prononcé et assumé, ce qui rend chaque scène d'action délectable et compréhensible.
Un final intelligent, quoique prévisible, replaçant un Batman détruit en tant que légende. Une fin qui laisse également le spectateur avec des clés interprétatives et imaginatives. Une bonne intention de la part du réalisateur.
Du bon et du moins bon en somme. « The Dark Knight Rises » n'a pas été une claque certes, mais il vient clore une trilogie des plus respectables, surtout lorsqu'on s'attaque à un univers aussi sombre et complexe que celui de Batman.
« The Dark Knight » reste et restera une référence pour longtemps, car un parfum mystérieux et un grain de folie s'en dégage. C'est peu être ce qui manquait à ce troisième volet : de la folie !
Un film que je compte revoir, pour le digérer une seconde fois. Et en V.O, je l'espère !