Dans l'Angleterre exsangue du début des années 50, Hester Collyer, jeune épouse d'un haut magistrat, entretient une liaison avec un ancien pilote de la Royal Air Force. Au mépris des conventions hypocrites de la bonne société, elle quitte son mari - quand bien même il refuse de lui accorder le divorce - pour s'installer avec son amant. Mais celui-ci, nostalgique de l'ambiance virile et survoltée de la guerre, ne supporte pas l'amour possessif que lui porte sa maîtresse et passe la majorité de son temps au pub. Consciente de l'impasse dans laquelle elle se trouve, la jeune femme ne voit plus d'issue à sa désespérante situation.

Adapté d'une pièce de Thomas Rattigan, un fameux dramaturge des année 30 dont l'oeuvre apparaît aujourd'hui un brin surranée, «The Deep Blue Sea» est le huitième long métrage de Terrence Davies (1945-2023) un réalisateur anglais dont les films largement autobiographiques n'ont pas souvent trouvé le chemin de nos salles de cinéma. Interprété tout en finesse par Rachel Weisz, le personnage d'Hester renvoie aux héroïnes romantiques des mélodrames flamboyants de Douglas Sirk ou encore plus directement à «Brève rencontre», le chef-d’œuvre de David Lean qui racontait à peu près la même histoire. Cinéaste visuel par excellence, Terence Davies parvient à éliminer toute théâtralité d'une histoire déjà vue ou lue mille fois, au profit d'une écriture d'une extrême subtilité qui lui permet de transcrire presque uniquement par l'image les tourments les plus intimes de ses personnages. La longue séquence d'introduction, sublimée par la musique de Samuel Barber, au cours de laquelle Hester prépare minutieusement son suicide, tout comme la scène d'amour où les corps des amants enlacés sont caressés par un mouvement de caméra circulaire témoignent d'un sens remarquable de la mise en scène. Tout sauf datée, cette histoire d'amour tragique dans un monde triste à mourir se termine toutefois sur une note d'espoir : refusant l'humiliation, Hester semble vouloir assumer sa solitude forcée. Un magistral portrait de femme! I

SteinerEric
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le 12 sept. 2024

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Eric Steiner

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