Sous un angle original, The Dish revient sur l’épopée de la mission spatiale américaine Apollo 11 qui vit les premiers astronautes poser le pied sur la Lune (sans oublier que l’objectif consistait également à revenir sur Terre sains et saufs). Des Australiens ont contribué au succès de cette mission, ce dont le film s’inspire. En effet, les liaisons radio et vidéo avec l’équipage devaient fonctionner en continu. Pour cela, il fallait couvrir aussi bien l’hémisphère nord que l’hémisphère sud. Or, le plus grand télescope de l’hémisphère sud se trouvait dans la campagne australienne. L’équipe qui y travaillait fut logiquement sollicitée.
On pourrait faire la fine bouche en considérant qu’on connaît la fin. Eh bien, figurez-vous que le film s’arrange pour proposer du suspense ! Imaginez donc un patelin perdu quelque part en Australie, avec à l’écart en plein champ, là où paissent des troupeaux de moutons, un radiotélescope avec son immense parabole reposant sur une large bâtisse ayant un vague air d’ancien moulin. Pour s’occuper de cet appareil, un groupe de quatre scientifiques, avec à leur tête Cliff Buxton (Sam Neill) veuf depuis un an qui tente d’oublier sa peine en se donnant à fond dans son travail. Le film commence alors que débute la mission Apollo 11 ce qui veut dire que d’ores et déjà tout est en place, ce qui limite les temps morts et le blabla. Ajoutons que l’équipe australienne est chapeautée par un américain désigné par la NASA. Dans cet état d’esprit, le gardien qui filtre les entrées dès que la mission débute se retrouve armé, à la grande surprise de ceux qui le connaissent. C’est d’ailleurs risible, car il se montre très mal à l’aise dans cette situation, puisqu’il connaît tous celles et ceux qui se présentent sur les lieux. D’ailleurs, rien ne laisse jamais soupçonner la moindre tentative d’intrusion suspecte. Concrètement, les employés qui travaillent sur le site se comportent plus ou moins comme d’habitude. Ils ressentent néanmoins une réelle pression, car visiblement la NASA ne veut rien laisser au hasard. Il faut dire que des images d’archives présentent les missions ayant précédé celle-ci, avec quelques accidents (on déplore plusieurs morts tragiques). Et ce n’est pas parce qu’ils n’ont qu’une mission de surveillance et de liaison (radio et vidéo) que leur rôle ne peut pas s’avérer crucial. Mais on ne se refait pas, nos scientifiques sont bien gentils et s’ils ne sont pas eux-mêmes de vulgaires péquenauds, ils vivent et travaillent dans un coin où ils en côtoient. Il n’y a qu’à voir le maire du patelin qui bave de se voir mis en lumière avec l’événement. Sans parler de sa femme qui fait partie de celles qui avouent ouvertement que non, elles ne sont pas capables de garder un secret. Heureusement, la charmante jeune femme qui apporte de bons petits plats n’a rien d’autre en tête que de faire les yeux doux au spécialiste un peu ahuri, très capable mais complexé. Bref, les habitants du village n’en reviennent pas de ce qui leur arrive. Finalement, le plus passionné, c’est le jeune fils du maire qui reprend régulièrement les uns et les autres par ses connaissances techniques.
Ce qui fait le sel du film n’est pas tellement visuel. En effet, une fois qu’on a vu la façon dont les employés jouent avec cette parabole qui pour eux fait partie des meubles, il reste quelques effets de cadrage et un peu de langage jargonnant assez banal. Le meilleur du film tient dans un imprévu très révélateur de l’état d’esprit général.
Un fâcheux oubli provoque une panne de courant. Apparemment anodin, l’incident s’avère lourd de conséquences puisque l’équipe perd le signal de la mission Apollo 11. On sent alors la pression mise par la NASA et par conséquent par l’Australie fière de contribuer à cet événement planétaire. Nos Australiens décident de gagner du temps en prétendant que le souci ne vient pas d’eux. En d’autres termes, comme les sous-titres l’indiquent, ces obscurs techniciens se mettent à « pipeauter » la NASA. Évidemment, à petites causes grands effets, surtout que c’est le moment que le Premier Ministre australien choisit pour venir visiter l’installation. Heureusement, il n’a aucune connaissance scientifique particulière et il se fait balader.
Nous avons alors droit à la séquence la plus hilarante du film, surtout qu’elle pourrait donner du grain à moudre pour les amateurs de théories complotistes. En effet, certains illuminés aimeraient nous faire croire que non, l’homme n’a jamais mis le pied sur la Lune et que tout cela est une vaste mise en scène destinée à prouver la supériorité américaine. On remarque d’ailleurs que le film idéalise un peu la situation en ne mentionnant jamais la grande rivalité russo-américaine dans cette conquête de l’espace, alors que nous étions en pleine guerre froide. Ceci dit, placées très judicieusement, le film nous présente des images d’archive qui apportent leur lot d’émotion. On revit ainsi l’alunissage et la première sortie d’Armstrong et Aldrin sur le sol lunaire. Au-delà de la formule restée dans la légende, les paroles d’Armstrong vont à cet instant où toute la planète a communié dans un même élan. C’est vrai, à un détail près : les Russes, eux, devaient crever de jalousie !
Ce film rappelle donc, à l’heure où l’IA facilite la production d’images tendancieuses, que le défi du XXIe siècle sera de faire la part des choses entre le vrai et le faux, le domaine de l’information étant particulièrement sensible.