Devoir de mémoire
Les yeux sont le miroir de l'âme, paraît-il. Et il suffit d'un regard, parfois, pour susciter mille émotions. The Father me l'a rappelé cet après-midi, avec le regard tour à tour hébété et...
le 3 juin 2021
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La maladie d'Alzheimer est un thème très délicat, relativement peu traité au cinéma. Florian Zeller aborde le sujet frontalement en adaptant sa propre pièce de théâtre. Ainsi, "The Father" nous fait suivre le quotidien d'Anthony, un octogénaire qui sombre dans la démence. L'originalité étant que les événements seront décrits exclusivement de son point de vue.
La première chose qui frappe durant le visionnage est bien évidemment la performance éclatante et bouleversante d'Athony Hopkins, qui éclipse les autres acteurs pourtant talentueux. A plus de 80 ans au compteur, l'acteur semble ne faire qu'un avec le personnage, jusqu'à lui prêter son prénom et sa date de naissance (!). Il parvient à juguler les émotions d'une personne qui doit plus ou moins brutalement faire le deuil de la perte de sa mémoire. Choc, déni, colère, tristesse, résignation : autant d'émotions qui le traverseront, quand il s'apercevra que sa mémoire disparait, telle de la neige qui fond entre les doigts. Un phénomène inéluctable, dont il ne reste que des bribes, très vaguement ressemblantes à ce qui subsistait à l'origine.
L'autre force du film est qu'il balaye les défauts habituels des adaptations de pièces de théâtre, souvent focalisées sur les dialogues et les situations. La mise en scène et la construction cinématographique ont ici toute son importance, montrant la confusion qui règne dans l'esprit d'Anthony.
Des personnages qui changent de visage et qui disparaissent/apparaissent violemment, au grès d'un simple contre-champ. Des lieux qui évoluent régulièrement, jusque dans certains détails (soyez attentifs !). Une photographie qui met l'accent sur certaines couleurs (bleu notamment) pour montrer comment l'esprit s'accroche de toutes ses forces à des détails. Des ellipses et des trous dans la narration. Des répétitions dans les scènes.
Le brio du film est qu'il parvient à évoquer cette confusion douloureuse, tout en ne perdant pas son spectateur. En effet, celui-ci comprend peu ou prou ce qui se passe... même s'il sait qu'il ne peut se fier à rien de ce qui est montré, car tout est vu depuis un esprit défaillant.
En résulte un drame intelligent et terriblement touchant, qui offre au passage un très beau final.
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le 28 déc. 2021
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