On pensait avoir vécu une lente descente aux enfers cinématographique du DCEU avec Shazam premier du nom, Wonder Woman 84 et Black Adam, et d'avoir touché le fond avec le lourdingue Shazam : Fury of the Gods. Mais il n'en était rien, à peine était-ce un apéritif, car voici Flash, celui qui mange le corps du DCEU, le vomit, puis le remange, puis le revomit avant de l'enterrer dans un champ de ruines.
Je le dit en toute honnêteté : tout au long de ma vie je n'ai eu envie de me barrer d'une salle de cinéma qu'une seule fois, et encore c'était juste une vague envie de me barrer, pas une envie irrésistible. Ce film était le Suicide Squad de David Ayer. C'est con, c'est un film DC. Et j'ai rien contre eux, à part le fait que la Warner n'arrive plus à produire correctement de bons films de super-héros.
Mais là... oh bordel... là c'est la deuxième fois de ma vie que j'avais envie de me barrer. Et pas juste un peu, j'avais furieusement envie de me barrer... Au bout de 20min de film... Mais il fallait que je reste. Déjà par respect pour mon meilleur pote qui m'a payé une place du ciné le plus cher de la ville (et auquel j'ai promis solennellement de lui payer le prochain ciné qu'on se fera pour laver cet affront). Et ensuite par respect envers le film et toute l'équipe derrière, malgré le résultat, ce qui me permet de me faire un avis définitif sur le sujet.
C'est terrible parce que je ne voulais pas voir ce film à la base, étonnement on n'aime pas trop les prédateurs sexuels ici, et encore moins donner de l'argent à un studio qui le met en avant, même si les problèmes les plus graves sont apparus plusieurs mois après la fin du tournage, au beau milieu de la post-production (le plus grave qui avait été révélé juste avant le tournage, c'était cette vidéo où on le voyait mettre à terre une fan en l'étranglant). La confirmation que le film était un flop commercial m'a en quelque sorte allégé la conscience en me persuadant que le studio allait perdre gros dans tous les cas (il a déjà été payé donc on ne lui donne pas d'argent directement, c'est le studio qui perd de l'argent), et que le Kevin Spacey wannabe n'allait plus être remis en avant de sitôt (ou tout du moins pas avant qu'il ait fini de se faire soigner, en espérant qu'il a été honnête sur sa volonté de guérir de ses problèmes mentaux et de drogues). Ensuite avec l'annonce de l’échec critique du film, je partais avec un à-priori négatif. Je savais qu'il se faisait défoncer, et j'y allais, au mieux pour me rassurer sur le fait qu'il n'était pas aussi terrible que ça, au pire pour me marrer du film avec ses CGI vendus comme la honte du siècle. Et là même le pire n'a pas suffit. Car passé l'infantilisation et le mépris pour l'intelligence du spectateur de la scène de l'hôpital, avec entre autres :
- ses bébés dégueulasses en CGI,
- une mise en scène fade du pourtant inventif Andy Muschietti,
- l'impression d'un deepfake du Batfleck en moto (oui, c'est moche à ce point),
- et un caméo totalement forcé qui vient chercher un chèque bien juteux,
on se rend compte, même sans rien connaître de la production compliquée du film, de la tristesse cinématographique que va nous proposer Flash.
Et en dehors du fait qu'on a envie de hurler ces mots doux à Barry Allen toutes les 2 minutes, le film ne propose pas grand chose au spectateur. L'arc narratif de Barry aurait pu être intéressant s'il avait été traité avec un minimum de rigueur et de sérieux. Au lieu de ça on se retrouve avec le même point de départ et traitement de Spiderman: No Way Home et son « multivers kon connai pa mé lol cé surment san dangé ». C'est même d'autant plus flagrant quand on regarde
le Barry du passé,
qui lui ne possède pas d'arc narratif ou d'évolution à proprement parler et qui enchaîne les dialogues et situations illogiques, alors qu'il y avait matière à en faire quelque chose d'incroyable (tout comme la découverte du véritable antagoniste principal qui est vaincu sans aucune montée de tension ou d'enjeu).
Quant à Michael Keaton, même s'il reste impérial comme à son habitude, son retour en tant que Batman reste en travers de la gorge tant il ne représente, au final, rien. Sûr il reste badass dans la scène d'action en Russie (qui est, au passage, la meilleure scène du film, et de très loin), mais le reste de ses interventions consiste en « je ne veux pas vous aider » suivi d'1 seconde plus tard, sans aucune justification, de « je vais vous aider sans le moindre doute ».
Mais le plus gros gâchis du film reste Supergirl. Sasha Calle est absolument monumentale dans ce rôle, avec une interprétation pleine de rage et de fureur. Son introduction lors de son évasion de la Russie est jouissive as fuck. Mais son personnage souffre du même problème que celui de Batman avec ses volte-faces à répétition, à ceci près qu'une fois l'affrontement avec Zod commencé, la trajectoire de son personnage et son importance dans le récit s'arrête brusquement, la rendant totalement inutile. Un personnage incroyable totalement bâclé sûrement à cause des réécritures.
Mais est-ce que tout est à jeter dans ce Flash ? Bien sûr que non, n'importe qui peut passer du bon temps devant, que ce soit sincèrement ou en se moquant du film. Y a Michael Keaton, Sasha Calle, la scène en Russie, quelques gags et blagues qui fonctionnent bien, Ben Affleck qui livre une magnifique performance en Bruce Wayne le temps d'une scène qui semble faire écho à sa propre vie, l'apparition
des multivers avec les anciens acteurs malgré la mocheté de leur apparition (grosse larme versée quand Christopher Reeve est apparu tout de même),
la meilleure blague-caméo de tous les temps dans l'avant-dernier-plan du film... Mais tout est malheureusement noyé sous une montagne de défauts qui nuit fortement au film et au plaisir qu'on pourrait en tirer.
Franchement je ne comprend pas la Warner. On sait tous que le projet est une arlésienne du type gouffre-à-pognon et qu'il y a eu moult réécritures entre différents scénaristes et réalisateurs qui voulaient apposer leur patte, en plus de la montagne de problèmes qu'a crée l'autre prédateur. Mais oser sortir une production pareille en 2023 est inacceptable, et je ne parle pas que des CGI ici. Il y a trop de problèmes sur quasi tous les niveaux de la pré-production à la post-production, autant dans l'écriture bourrée d'illogisme en tous genre que dans la mise en scène fade et sans réelles idées, avec des CGI clairement pas finis et ses incrustations mal branlées. J'avais envie de défendre le film, de croire que Muschietti pouvait réussir l'impossible. Mais force est de constater que l'espoir n'est qu'une illusion et la rédemption du DCEU impossible, la faute, sûrement, à la Warner qui n'aura jamais cessé de mettre des troncs d'arbre dans les roues de toutes les personnes qui voulaient juste rendre hommage à cet incroyable univers qu'est DC.
Au final, la scène post-générique résume le film à la perfection. Un mec bourré qui s’effondre dans une flaque d'eau et se noie dans son vomi.