Quan est un restaurateur sans histoire de Londres, vivant avec sa fille unique de seize ans. Alors qu'il l'emmène chez un couturier afin qu'elle puisse s'offrir la robe dont elle rêve pour le bal de fin d'année, une explosion réduit la boutique en cendres. L'attentat, revendiqué par une nouvelle branche de l'IRA, va lui ôter la vie, et pousser Quan sur le chemin de la vengeance, jusque dans le bureau du vice-Premier Ministre Liam Hennessey, ancien membre du groupuscule irlandais devenu une importante figure politique après un séjour derrière les barreaux. Quan veut des noms, mais Hennessey prétend ne pas pouvoir lui venir en aide- ce dernier va rapidement découvrir qu'il n'était pas malin de se mettre à dos un ancien des Forces Spéciales Chinoises, rongé par le deuil et qui n'a plus rien à perdre...
La qualité d'acting de Jackie Chan n'est plus à prouver, pour qui est assez curieux pour s'aventurer hors de Rush Hour et de Shanghai Kid. Le chinois bondissant a déjà prouvé par le passé qu'il possédait une gamme à faire pâlir ses congénères stéroïdés, qu'il s'agisse de ses tourments à concilier son boulot de flic et la vie de son frère handicapé dans First Mission (Sammo Hung, 1985), ou plus récemment par son traitement de la dépression et de l'alcoolisme dans le sous-estimé New Police Story (Benny Chan, 2005).
Dans ce nouvel actioner sino-britannico-américain, Chan incarne avec une justesse désarmante ce père seul au monde, prêt à jeter jusqu'à l'utlime once de force de son corps de sexagénaire dans la bataille, contre des gardes du corps, des militants poseurs de bombe, des anciens Marines... un last man stand à l'ancienne, sublimé par une mise en scène efficace, qui laisse l'acteur s'exprimer dans de longs plans, plus proches des perles HK des eighties que du blockbuster épileptique qui nous abrutit depuis maintenant plus de vingt ans. Martin Campbell lui offre sa caméra, pour lui permettre de briller encore, et prouver qu'il reste une légende, entre deux navets mollassons écrits de la main gauche par des incompétents pour qui "Jackie" rime avec "gnocchi".
Face à lui, un Pierce Brosnan étincelant, flamboyant en politicard poivre et sel. Il crève l'écran en salaud contenu, excellant du mépris à la rage, dans ce rôle d'anti-007 jouissif, prêt à fricoter avec tous les bords par ambition, quitte à danser dans les bas-fonds. Un personnage qui marque les retrouvailles de Campbell et Brosnan, vingt-et-un ans après Goldeneye- des retrouvailles qui donnent du plaisir, voire quelques frissons, lorsque le réal se laisse aller à filmer l'acteur en contre-plongée, flingue à la main, ou en état de domination, dans des scènes de dialogue qui prouvent que Pierce n'a rien perdu du charisme de l'ère Ian Fleming.
Excellente surprise que ce Foreigner, à la trame pourtant ultra rebattue, mais sauvée par deux piliers du cinéma, superstars d'action tombés dans le troisième âge, et un réal efficace, qui après avoir relancé James Bond deux fois (Goldeneye et Casino Royale), se permet de réunir deux vétérans pour une péloche diablement revigorante. Le genre de projets qui manque cruellement de nos jours.
Regarder The Foreigner, c'est comme retrouver deux vieux oncles, les écouter parler, et profiter ensemble d'une sincère mélancolie.