Bon.
J'ai voulu écrire des trucs rigolos et un peu geeks comme "vieux con blasé no more", ou des trucs de fanboy enthousiaste comme "Putain. Mais. Quelle. Leçon", ou des pavés abscons plein de références imbitables, ça et plein d'autres choses, et y mettre tout ce que je pourrais de figures de styles, de jeux de langage, de formules prétentieuses mais là, contre toute attente, c'est la panne sèche.
Un quart d'heure à peine après le final cut de The Frame, le dernier film de Jamin Winans (Ink), je suis toujours sans mots, toujours en train d'essayer de digérer, intellectuellement comme émotionnellement, les deux heures qui viennent de passer sur un nuage.
J'attendais énormément de ce film. Autant, sinon beaucoup plus, que je n'en attendais d'Interstellar.
Quelque chose d'unique, de profond, de puissant, d'imprévisible. Quelque chose de nouveau, qui saurait m'embarquer, sans réserve, en dépit de mes bientôt 40 années au compteur. Qui ferait fi des sentiments de déjà-vu, et pas dans la demi-mesure. Qui me rappellerait par l'exemple ce que c'est que d'être créatif, ce que c'est que d'être scénariste, ce que c'est que de faire du cinéma.
J'avais mis la barre haut, par dépit autant que par volonté d'y croire. Sans grand espoir, mais avais-je seulement le choix ? Jamin Winans semblait le seul à pouvoir encore exaucer mes voeux.
Et puis voilà.
Paf.
Dans mes dents.
The Frame n'est pas seulement le plus grand film de 2014, ou de ces cinq dernières années. The Frame est un chef d'oeuvre. Un des films les plus remarquables, les plus bluffants, les plus immersifs qu'il m'ait été donné de voir - et pourtant, Dieu sait que j'ai pu en voir ! -, un film d'une ampleur, d'une ambition formelle impossible à décrire, à définir. Une expérience. Généreuse, humble, sincère et pourtant, supérieure en tous points à la plupart de celles que vous avez pu vivre, pour peu que vous y soyez sensibles.
Ink était déjà un modèle, en dépit de son peu de moyens. The Frame remplace le coeur par la raison, le viscéral par l'intellect mais parvient, dans un autre registre, a réitérer le miracle.
Et s'offre même le luxe d'être plus réussi.
J'avais mis la barre aussi haut qu'il était humainement concevable de le faire. Jamin Winans m'a prouvé par l'exemple que je n'attendais pas encore assez.
Il m'a botté le cul avec un talent dingue.
Alors le cul de la concurrence, c'est vous dire s'il prend cher.
(ça, c'était l'avis à chaud. Pour la chronique, c'est par là : http://www.gameblog.fr/blogs/liehd/p_110445_decouverte-cine-the-frame-s-il-fallait-n-en-voir-qu-un-en-20 :)