Très intéressant par son propos, à savoir un traitement humaniste de la fin de la guerre de Corée, mais dans le même temps amputé par des scènes lacrymales pompeuses et un script qui s'étire un peu trop, The Front Line convainc autant qu'il nous met sur la réserve. Propulsé par des moyens techniques colossaux, il démontre le savoir-faire technique de son réalisateur, à l'occasion, notamment, de mouvements de caméra impressionnants. Tous les plans séquences nous laissant découvrir la colline que les deux camps se disputent sont à couper le souffle. Dommage, cependant, que cette fougue technique ne soit pas davantage inspirée dans sa mise en oeuvre. Rapidement, The Front Line recycle, et peine à renouveler sa façon d'introduire les combats ainsi que les hommes qui s'y mettent des bastos.
Ces hommes qui font tout l'intérêt du film puisqu'ils véhiculent son message premier. Après presque 3 ans de combat, la violence n'est plus motivée par aucune conviction, mais plus par la force de l'habitude. Ni haine, ni passion, simplement cet aspect du métier de soldat qui consiste à exécuter les ordres, y compris les plus stupides. Rien, à ce niveau là, qui n'ait déjà été traité dans la plupart des films de guerre. La petite subtilité intervient dans la comparaison intelligente entre les soldats des deux camps. Par l'intermédiaire une petite cachette située au centre de cette colline qu'ils envahissent, et perdent, tour à tour, deux petits groupes de combattants ennemis, communiquent. Ce qui, au départ, devait être une planque stratégique, devient un moyen de se rendre compte que la guerre est ressentie de la même manière dans le camp adverse. Comme un acte devenu vain, dont la motivation initiale a depuis longtemps été oubliée.
Pour illustrer son message, Jang Hun s'appuie sur une petite galerie d'acteurs aux ganaches sympathiques, qui fait le boulot, mais manque cruellement d’expérience et de tempérament. Il y a bien le général Nord Coréen qui se démarque des autres, mais son personnage manque de temps à l'écran pour prendre suffisamment d'ampleur. Ce manque d'expérience du casting est regrettable parce que certains personnages valent le détour, comme ce sniper mystérieux, 2 seconds. L'idée à son origine est géniale, sa première "apparition" semble presque fantastique: on est pris dans le moment, le palpitant aux aguets. Et quand on découvre enfin son identité, c'est la douche froide, le soufflé retombe immédiatement. Un joli minois certes, mais qui manque de caractère, une particularité que se partagent quasiment tous les lead de The Front Line. Tout cela manque d'un soupçon de rugosité.
C'est d'ailleurs un reproche que l'on peut faire au film dans son ensemble, son côté un peu hétérogène, trop grand spectacle, trop précis. Même quand le trash est de la partie pour illustrer l'horreur de la guerre, on sent beaucoup trop le côté forcé de l'image, c'est parfaitement composé, pas assez chaotique. Une approche trop hollywoodienne en somme qui se ressent aussi dans cette photographie précise, génératrice de moments graphiques finement composés, mais qui peinent à devenir moteurs de la mise en scène. Du film à grand spectacle, qui se veut un peu trop propret, malgré le côté parfois gore de ses séquences. Ce côté formaté et carré, on le retrouve également dans la surenchère émotionnelle qui touche les séquences labellisées larmes du film, comme lors de ce dernier hit de 2 seconds, agrémenté d'un ralenti dégoulinant au moment où les violons se mettent à pleurer.
Trop marqué par son envie de faire jeu égal avec le copain américain, The Front Line se perd dans une démonstration spectaculaire un peu trop forcée, qui se fait au détriment de son intention de départ, qui avait pourtant de quoi provoquer l'intérêt. Et même si le message passe, parce qu'il est intelligent et justifié, on regrette, en fin de séance, qu'il n'ait pas été appuyé par plus de subtilité dans sa mise en oeuvre.