Sympa. Non, pas juste sympa comme le Resident Evil et l'Alien v/ Predator de l'autre Anderson. Ce sont là deux films qu'on ne peut trouver sympa qu'une main dans le caleçon un mardi soir sur NRJ12 en deuxième partie de soirée sous réserve d'une alcoolisation latente - comme dirait Mary Poppins, ça aide la médecine à couler.
Si tu lis assidument les critiques de nos deux comparses Marseillais Kenshin et Guyness, tu l'auras compris, je suis passé pour un con. J'ai osé dire que la constante mise en scène et la réalisation minutieuse légèrement précieuse de Wes Anderson m'indiffèrait totalement. Hélas, c'est vrai, c'est comme ça, c'est peut être une tare, surement même mais c'est comme ça. Je vois bien qu'il y a un travail muri de longue haleine, que chaque plans, chaque ton de couleur, chaque travelling est décortiqué, choisis minutieusement. Je vois bien l'effort de rendre le récit réaliste dans des détails parfois insignifiants : par exemple M. Gustave vient de se faire tabasser, il avale une gorgée d'eau et l'on voit des légers voluptes de sang vermeil se repandre dans le verre. Mais ça m'emmerde terriblement quand même.
Finalement je suis peut être trop jeune pour apprécier pleinement ce genre de film. Il traite avec un brio certain de la sensation que l'on connait lorsque l'on voit le monde dans lequel on évolue changer drastiquement sans nous attendre. Cette sensation de déphasage, comme si la réalité n'avait plus de place pour nous, est parfaitement mis en exergue par M.Gustave. Ce héros grandiloquent exhalant littéralement le panache et une certaine pédenterie sympathique qui déclame avec ferveur des vers romantiques n'est plus de ce monde, et ne l'a même jamais été comme le confirme son lobby boy. Il est une sorte de reliquat d'humanité complètement absente d'un monde moderne plongé dans la guerre( qu'elle soit de succession ou non ), la maladie, le temps qui passe et emporte dans sa décrépitude bâtiments, montagne séculaire et le tout petit être humain.
Je pense que c'est en ça que le film ne m'émeut pas plus que ça, il a des qualités indéniables mais je ne peux décemment pas me retrouver en lui. Je me sens bien dans l'époque où j'évolue. Elle est étrange, folle, virevoltante mais je m'y sens bien. Si mes goûts littéraires sont un peu vieillot, je n'idéalise pas le passé. A posteriori tout parait bien souvent meilleur, plus beau, moins pauvre, plus riche, moins triste, plus libre, moins fou.
Lors du repas post séance où nous discourions du film, de mon inculture filmesque, de l'inculture musicale de Sideness (Les Beatles quoi !), de choses et d'autres sur senscritique, Guyness a parfaitement résumé la culture.
Nous regardons la culture, un film, un livre, une musique, un tableau par le prisme de notre éducation, de nos expériences.
Dès lors nos avis peuvent évoluer, je dis aujourd'hui que ce film est sympa. Peut être qu'un jour je le montrerais à mes enfants sur le téléviseur holographique du salon. Ils le trouveront juste sympa, comme moi auparavant. Alors que pour moi il symbolisera à lui seul une excellente soirée passée sous la terrasse chauffée d'un restaurant alors que le beurre persillé de mon plat se délayait dans les fibres de mes haricots verts.
Un peu comme chaque seconde se perd dans le flux de notre existence.