The Lunatics par Jonathan Asia
1ere réalisation de Derek Yee, The lunatics est un film social avant tout, profondément humain et empli d’émotions.
Sans aucun doute le meilleur rôle de Stanley Fung, juste exceptionnel dans la peau de cet homme qui se bat pour les « lunatics », tout en sachant son combat vain car il n'obtiendra jamais d'aide ou de reconnaissance du gouvernement ou des médias. Il vit au jour le jour, essayant de garder en lui l'espoir de faire bouger les choses, tout en sachant pertinemment que rien ne changera. L'acteur livre une performance tout en émotions, en justesse, il fait passer beaucoup de choses avec son regard fatigue. Ayant découvert l'acteur dans les films Lucky Stars, où il jouait le Grand Frère farceur, ce fut un vrai plaisir de le voir changer de registre pour ce film.
Deannie Yip joue une journaliste qui au départ n'en fait qu'à sa tête, risquant parfois sa vie et la confiance et les liens que Stanley a mis tant de temps à tisser auprès de ses protégés. Agaçante au premier abord, elle va se révéler être l’élément central du film, celle qui vient de l’extérieur pour poser un œil sur le combat d'un home épuisé.
La jaquette du film montre Chow Yun Fat et Tony Leung Chiu Wai en « vedettes », mais c'est trompeur : à eux deux, ils doivent cumuler moins d'un quart d'heure de présence à l’écran. Ils jouent des Lunatics, l'un encapuchonne et vêtu d'un imperméable, qui déambule dans les marches en effrayant à qui mieux mieux les clients, et l'autre un homme livre a lui-même. Tous deux excellents et à contre emploi, les deux stars offrent de belles performances.
Le 3e Lunatic le plus important du film est joue par Paul Chun, ici un homme guérit qui lutte pour revoir son fils plus souvent en dehors de la visite mensuelle et sous surveillance. C'est lui qui aura les scènes les plus mémorables, il est le moteur quasi principal du film. L'une de ses apparitions sera d'ailleurs la scène la plus intense, d'une tension assez incroyable et palpable. Scène ou jouera d'ailleurs la frêle Season Ma, dont c'est toujours un plaisir de revoir l'enfantine frimousse.
Bien réalise, avec une musique discrète, The Lunatics regorge de qualités d’écriture, car dans les œuvres de Derek Yee, l'accent est mis sur la psychologie des personnages autant que sur les situations qu'ils vivent. De ce fait, on s'attache rapidement à chaque personnage, de Stanley en passant par Deannie Yip l'apprentie imprudente, jusqu'au collègue épuisé par son combat qui a baisser les bras ( formidable Dennis Chan). Les événements sont fluides, chaque péripétie et chaque rencontre nous rapprochent du duo de héros.
Dans son ensemble, le film soulève pas mal de questions : Qui peut s'occuper des Lunatics ? Faut-il les laisser dans la rue, survivre comme ils le peuvent et en prenant le risque qu'ils agressent un jour quelqu'un ? Les laisser à leur famille, comme pour le personnage de Paul Chun ? Les hospitaliser à tout prix, même si comme le souligne l'un des personnages secondaires, ce n'est pas une solution mais une facilitée ? Quels moyens sont mis en place, quel budget ? Qui pour aider, prévenir et soutenir la famille ?
Film social autant prenant qu’émouvant, The Lunatics permet de réfléchir, sans jamais ennuyer ou culpabiliser qui que ce soit, sur le combat solitaire d'une poignée d'individus. Un combat méconnu, un film audacieux et magistralement mené et interprété, une œuvre marquante et dans mon top 10 du cinéma Asiatique .