Journal de bord - Jour 17

--- Bonsoir, voyageur égaré. Te voila arrivé sur une critique un peu particulière: celle-ci s'inscrit dans une étrange série mi-critique, mi-narrative, mi-expérience. Plus précisément, tu es là au seizième épisode de la septième saison. Si tu veux reprendre la série à sa saison 1, le sommaire est ici :

https://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163

Et si tu préfère juste le sommaire de la saison en cours, il est là :

https://www.senscritique.com/liste/les_petites_sirenes/3094904?page=1

Et si tu ne veux rien de tout ça, je m'excuse pour les parties narratives de cette critique qui te sembleront bien inutiles...---

Les journées en mer commencent à être monotones. Je ne peux me plaindre de rien, l'harmonie règne sur le le bateau. De manière assez improbable, monstres et humains y cohabitent pacifiquement. Dans ce petit univers en suspens au dessus de l'abysse, nous savons tous que chacun est précieux. Puisque la tolérance, l'entraide et le respect sont indispensables pour faire avancer le navire, nous faisons ce qu'il faut. Et nous avançons. Mais moi, je sais que Lycaon m'attend sur la côte où nous ferons notre prochaine escale, alors je me languis de lui. Plus nous nous rapprochons, et plus le temps semble ralentir. Je partage mon temps entre le capitaine et Sirius. Le premier me raconte tout ce qu'il sait de la vie en mer, tout ce qu'il y a vécu, tout ce qu'il y a appris. Le second m'initie avec enthousiasme à tout ce qu'il a appris auprès des jeunes matelots qui sont devenus ses amis et qui lui apprennent avec patience à naviguer. Cette belle harmonie me plaît. Même si elle est éphémère, même si elle se brisera quand notre voyage prendra fin, quand chacun finalement devra s'en retourner à son existence, je me dis que pour l'instant, pour un bref moment, une goutte d'eau dans l'éternité, j'ai enfin réussi à bâtir la société dont j'ai toujours rêvé. J'aimerais que la reine des vampires voit ça. J'aurais aimé que l'homme invisible voit ça. J'ai hâte que Lycaon voit ça. En attendant, c'est à nous de voir, et une fois de plus, j'ai réuni l'équipage sur le pont, pour partager une nouvelle aventure pelliculée.

The Nice Guys. Pour être tout à fait honnête, je n'ai pas l'habitude de critiquer ce genre de film, et je n'ai aucune idée de comment m'y prendre. Le mois-sirène vogue de surprise en surprise, et bien malin sera celui de notre équipage qui saura dire de quel genre relèvera le prochain film que nous visionnerons. Ce soir, un film d'action policier. Je crois bien que c'est une première. Certes les sirènes y jouent un rôle anecdotique, encore une fois plus pour souligner le faste et la décadence de l'univers dans lequel on les trouve que pour réellement avoir un enjeu dramatique. La sirène est décor plutôt que personnage. D'ailleurs il ne lui est pas accordé la moindre ligne de dialogue. Son rôle d'exposition de l'univers (bien que ce soir elle ne traduise pas le fantastique, puisqu'à aucun moment il n'est suggéré qu'elles puisse être une vraie) se conclut en situation comique (faire nager Ryan Gosling en caleçon dans l'aquarium à la poursuite des sirènes, moi ça me fait beaucoup rire). Ça ne fait pas beaucoup avancer notre étude, sinon pour renforcer d'un nouvel exemple les théories que j'ai déjà ébauchées.

Cependant il est hors de question de dire que le visionnage de ce soir est un échec. A en juger par les visages euphoriques qu'éclaire encore faiblement le générique du film, je peux dire que le film a plu à mes camarades de bord, monstres ou marins. Car le film n'est pas vraiment un film de sirènes, certes, mais il est par ailleurs en tout point excellent. Ryan Gosling, détective holistique, armé de sa plus ridicule moustache, embarque le spectateur à la découverte de son enquête loufoque, accompagné d'un montage précis et subtile comme une partition de musique. C'est drôle, haletant, et diablement malin. Pour accompagner ce bal jouissif et magistralement orchestré, Philippe Rousselot délivre une image parfaite, précise, pointue. Bien que le film propose une action se déroulant dans les années 70, il s'enrobe dans un scope sphérique définitivement moderne, coloré et maniéré. L'accompagnent des décors et des costumes parfaitement ajustés, pop, dans lesquels on imaginerait sans peine une pièce de Broadway. Cette robe jaune rivalise sans soucis avec les plus emblématiques des princesses Disney. Et cette moustache bon sang ! Ryan Gosling, mon petit chat, quel chemin parcouru depuis ce film abscond qu'était Drive et dans lequel je t'avais mépris pour un mauvais acteur...