Initialement prévu comme une série télévisée, The Nice Guys permet au célèbre scénariste Shane Black de revenir à la mise en scène trois ans après être passé par la case Marvel pour les besoins de Iron Man 3, commande aussi carrée qu'impersonnelle.
Visiblement heureux de pouvoir revenir à son univers de prédilection sans qu'on ne lui mette trop de bâtons dans les roues, Shane Black fait le choix de reprendre la formule magique de son génial Kiss Kiss Bang Bang, et de nous resservir les mêmes ingrédients à base de cité des anges, de privés déglingués, de starlettes paumées ou de gangsters patibulaires et hauts en couleurs.
Une ambiance funky et jazzy, à la fois cool et violente, qui avait déjà fait ses preuves au temps du premier Lethal Weapon, et qui fonctionne encore du tonnerre. Rien de véritablement neuf ou d'original, bien au contraire, mais la satisfaction toute simple de savourer le travail d'un artiste nous offrant ce qu'il sait faire le mieux.
Peut-être un brin prévisible à force de jongler avec des codes qu'il ne cesse de retourner dans tous les sens depuis ses débuts, Shane Black s'éclate comme un gamin sans oublier de faire preuve d'une certaine rigueur à la fois formelle et narrative. Tortueuse et bourrée de sous-intrigues, l'intrigue n'en reste pas moins limpide, chaque élément s'imbriquant parfaitement, pendant que la mise en scène s'avère solide et humble, ne cherchant jamais à en mettre plein la vue gratuitement.
Une fois n'est pas coutume, le duo vedette est au coeur même de la réussite du film, les personnages chez Shane Black, aussi stéréotypés puissent-ils paraître au premier abord, bénéficiant toujours d'une écriture aux petits oignons. C'est toujours le cas ici, le scénariste / réalisateur parvenant à apporter une petite touche d'humanité à chacun des protagonistes, sans jamais en faire trop ou se perdre en pathos inutile.
Si toute la distribution est excellente (sauf peut-être Kim Basinger, sous-exploitée et inexpressive), c'est bien entendu le tandem Russell Crowe / Ryan Gosling qui tire son épingle du jeu. Le premier, marqué par les années, est à la fois badass et touchant en cogneur, son rôle rappelant par moment celui qu'il tenait déjà dans le mythique L.A. Confidential. Le second, immense, étonne dans un total contre-emploi et fait preuve d'un génie comique qu'on ne lui soupçonnait pas, sans jamais résumer son personnage à un simple loser. La relation tumultueuse avec sa jeune fille (parfaitement interprétée par Angourie Rice) est à ce sujet une réussite, la présence de la gamine apportant une humanité et une relative innocence à l'ensemble, comme si Shane Black s'interrogeait sur une noirceur et une violence excessive (ici en mode mineur) qu'il a lui-même contribué à populariser.
Bien que souffrant d'une très légère baisse de rythme à mi-parcours et se reposant un peu trop sur une recette éculée, The Nice Guys fait un bien fou, bénéficiant au passage d'une reconstitution soignée et d'une bande originale diablement entraînante. Le parfait buddy-movie à se taper entre potes le samedi soir, afin de se remémorer, les yeux humides, une époque ô combien cool et fun.