Présenté à Venise en 2018, sorti en Australie à la fin du mois d'août 2019, The Nightingale, le deuxième film de Jennifer Kent, après le très remarqué Mister Babadook, atteindra-t-il un jour les écrans français ? Il faut le souhaiter car le film est de ceux qui ne laissent pas indifférent, très violent et sans doute trop manichéen mais d'une puissance telle qu'il dépasse de loin son apparent statut de film de vengeance. L'histoire est celle d'une condamnée d'origine irlandaise, déportée en Tasmanie, dont la raison de vivre est d'éliminer les soldats anglais, ces diables, qui ont fait entrer la tragédie dans son existence. Le contexte est essentiel : en 1825, à la période de la "guerre noire" qui opposait Aborigènes et britanniques en Tasmanie. Certaines scènes de The Nightingale sont proches de l'insoutenable, n'épargnant ni les femmes ni les enfants, dans une ambiance qui rappelle les westerns sanglants de Sam Peckinpah. Le duo que forme l'héroïne et son guide, Aborigène, est l'une des bases de la réussite du film qui évite, autant que faire se peut, les raccourcis psychologiques, misant sur la lente évolution de deux mentalités que tout oppose et sans céder à un quelconque sentimentalisme. Jennifer Kent est radicale dans la mise en images de son propre scénario comme dans sa vision des colonialistes anglais dont la cruauté est sans doute fidèle à la réalité mais aurait pu cependant être un tantinet nuancé. La majeure partie du film se passe dans les forêts tasmaniennes et le rapport à la nature de même qu'une pincée d'onirisme viennent agréablement abaisser la tension de temps à autre. L'écriture brillante de The Nightingale, son efficacité d'exécution et la qualité de son interprétation confirment le talent d'une réalisatrice qui, à l'instar d'un grand nombre de cinéastes océaniens, ne devrait pas tarder à se voir proposer un sujet à Hollywood. Ce qui, forcément, ne serait pas une bonne nouvelle tant on l'attend surtout développer à l'avenir des sujets australiens et personnels.