Brady est un cowboy, un vrai, c’est un homme des plaines, ces vastes plaines du Dakota, superbes et infinies, où la nature impose sa force et sa douceur, des nuages à la terre, des canyons au moindre brin d’herbe. Brady était une star montante du rodéo jusqu’à ce qu’un accident le cloue au sol et brise ses rêves, jusqu’à ce qu’un cheval sauvage se cabre, l’arrache à lui, piétine sa tête et écrase son crâne. Hémorragie interne, attaque cérébrale et trois jours de coma. Brady se rétablit, est un miraculé. Mais sans pouvoir remonter sur un cheval, continuer le dressage ou le rodéo (il ne survivrait pas à un nouveau choc à la tête), c’est toute sa vie qui perd alors de son sens (et lequel lui donner désormais ?).
Entre fiction et documentaire, The rider rejoue l’histoire de Brady avec sa vraie famille et ses vrais amis que Chloé Zano approche avec une rare délicatesse, avec une totale empathie. Le film est plus convaincant quand il se contente de montrer simplement (les séances de dressage, magnifiques, l’univers du rodéo, ses codes et ses traditions, le dur quotidien dans une Amérique à la marge, qui paraît dissociée de tout…) que dans la reconstitution d’une réalité qui tourne parfois aux clichés (les discussions au coin du feu, les conflits avec le père, les atermoiements très, trop photogéniques de Brady…).
Ou quand il l’arrange à son avantage : Lane Scott, ami de Brady, ne s’est pas retrouvé lourdement handicapé suite à un accident de rodéo comme le laisse supposer le film, mais à un accident de voiture, et Zhao décide volontairement d’occulter ce fait, "jouant" de cette ambiguïté au profit d’une dramatisation assez discutable (et un rien putassière). Dommage parce que The rider, en plus de magnifier étendues primitives et grands espaces à la façon parfois d’un Terrence Malick, décrit aussi, et sans chercher à édulcorer quoi que ce soit, les ravages physiques du rodéo (au mieux quelques blessures, jambes ou bras cassés, au pire traumatisme crânien), l’envers du décor (alcoolisme, isolement et précarité sociale) et la passion obsessionnelle, quasi maladive, de ces garçons qui vouent leur existence à ce sport-spectacle et pour qui il semble ne rien avoir d’autre, à l’horizon.
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