Il aurait peut-être mieux valu écouter les cris d'alarme scientifiques ! Dans une société fatiguée par une situation pandémique qui n'a que trop duré à ses yeux, un virus grippal se met à muter du jour au lendemain pour transformer la population en enragés désinhibés de tout semblant de moralité, prêts à suivre leurs bas-instincts les plus malsains. Dans la folie furieuse qui s'empare du pays, un jeune couple va tout faire pour se retrouver...
Sans trop s'avancer, "The Sadness" fait sans doute figure de parfait candidat pour le titre de la boucherie de l'année 2022 !
Réalisé par le canadien Rob Jabbaz, ce long-métrage taïwanais ne s'embarrasse clairement pas de gants pour déchaîner la fureur la plus dépravée des tares refoulées de notre monde civilisé. Dans ce qui pourrait s'apparenter à un "The Crazies" boosté par les représentations imaginatives d'un tsunami de déviances bestiales et sanguinaires (mentions spéciales au passage intense du métro et à une séquence bien ignoble d'ordre... disons... oculaire), "The Sadness" saura satisfaire les amoureux du genre par son audace généreuse et débridée en la matière tout en tapant sur à peu près tout ce qui bouge dans ce qu'il entend dénoncer comme travers sociétaux.
Conspirationnistes du Net confortant la population dans ses positions simplistes, comportements masculins toxiques déboussolés par le statut de la femme moderne, jeunes zombifiés par les écrans ou encore représentants politiques déconnectés des attentes du peuple (les autorités chinoises sont plus particulièrement visées au vu de la situation avec Taïwan), Rob Jabbaz n'épargne rien ni personne, quitte même à sombrer dans un nihilisme jusqu'au-boutiste dans sa dernière partie où, malgré encore de belles idées, le film perd de sa force en se focalisant trop longtemps sur un nombre restreint de personnages, notamment son couple vedette hélas pas aussi fort que souhaité. Outre un déroulement global qui ne surprendra que les spectateurs les plus néophytes (on évolue en terrain archi-connu de ce côté-là), ces deux protagonistes principaux assez fades, seulement guidés dans les événements par la voie facile de sentiments trop vite définis, seront effectivement le gros point noir du film, même si quelques situations toujours bien senties viendront faire la part belle à l'héroïne interprétée par Regina Lei.
Mais bon, ne boudons pas notre plaisir, rares sont aujourd'hui les films de ce type, surtout pour les amateurs les plus blasés, qui sont aussi bien portés par l'énergie tonitruante et primitive de la folie qu'ils mettent en scène. Au-delà de ses imperfections, "The Sadness" aura ouvert une porte sur le pire de l'humanité par les tableaux les plus monstrueux qui puissent en découler, où le prétexte d'un virus n'est finalement qu'un des nombreux détonateurs à cette rage irrationnelle, étouffée et rampante dans l'ombre du quotidien...